Indécente « fronde patronale »

Indécente « fronde patronale »

Depuis quelques années, la France est entrée, à l’instar des autres pays, dans une ère dite de « post-vérité ». Concrètement : les mots ne veulent plus rien dire et on peut entendre des ministres, des patrons, éditorialistes et autres « autorités » intellectuelles raconter n’importe quoi, au vu et au su de tous et de toutes, à l’instar des propos sidérants et mensongers d’Elisabeth Borne au sujet de la carte vitale. La ministre (et ancienne chef de gouvernement) avait avancé, sans être contredite, que la censure provoquerait la désactivation de la carte vitale au 1er janvier 2025 : une énormité dont la seule utilité était de provoquer confusion et panique, surtout chez les personnes vulnérables, afin de faire pression sur les oppositions.

Il y a quelques jours, les journalistes de préfecture et les médias des milliardaires ont multiplié leurs efforts pour tenter de justifier et légitimer la « fronde » des grands patrons, dont Bernard Arnault de LVMH, Florent Menegaux, patron de Michelin, et Patrick Martin le président du Medef.

La palme revient sans doute au magazine « Le Point » qui titre « Qui est Florent Menegaux, le PDG de Michelin devenu lanceur d’alerte ? » et oublie un peu vite, à trop vouloir comparer le serial-licencieur de Clermont à des Edward Snowden ou autre Julian Assange, les milliers de licenciements engagés par la multinationale.

Auditionné par la commission des Affaires économiques du Sénat, le mercredi 22 janvier,  Florent Menegaux avait notamment déploré l’écart entre un coût du travail soit disant « trop élevé » et des salaires net perçus par les salariés « trop faibles ». Un comble quand on sait à quel point le groupe Michelin pressurise ses salariés, tant dans la rémunération que dans les conditions de travail. Le groupe engrange les bénéfices, organise et planifie la délocalisation de ses activités industrielles, et rejette la faute sur, de fait, un modèle social soit disant trop généreux et donc hors sol, un Code du Travail trop rigide… On connait la chanson.

Jeudi dernier, c’est le président du Medef Patrick Martin qui avait donné « raison » au PDG de LVMH qui menace de délocaliser ses activités aux Etats-Unis. « La colère monte » parmi les adhérents du Medef face aux choix économiques du gouvernement, avait-il, toute honte bue, affirmé

Les patrons ont donc décidé de « donner de la voix » face, notamment, aux timides sons de cloche qui appellent à une meilleure répartition des efforts budgétaires. Cela pourrait prêter à sourire tant on connait l’ampleur de la politique pro-business, c’est-à-dire le détricotage des droits sociaux et le sauvetage, maintien et garantie, par l’Etat et l’argent public (et au détriment de la réponse aux besoins) des marges de profits des actionnaires des grands groupes.

En réalité, on assiste à une belle comédie, orchestrée et scénarisée de A à Z. L’effort demandé aux patrons est tout simplement ridicule au vu, et des besoins, et des extraordinaires profits engrangés par les grands groupes. Pire, cet « effort », est utilisé – alors qu’un tiers du budget de l’Etat disparait dans les poches des capitalistes français, chaque année – pour imposer de nouvelles coupes dans les dépenses sociales.

Même la ministre des Comptes publics, la sinistre Amélie de Montchalin, ne s’en cache pas : « Oui, nous leur demandons un effort, mais en contrepartie, l’État fait le plus gros effort d’économie qu’il n’a jamais fait depuis 25 ans », a-t-elle souligné sur BFMTV/RMC. « Ce qui est sur la table n’aurait jamais été proposé si ce n’était pas exceptionnel », a-t-elle relevé, en rappelant l’engagement d’un « retour en arrière en 2026 ».

Le patronat se moque du monde. Ce faisant, il attise la colère des salariés. Les patrons et les actionnaires des grands groupes se gavent sur notre dos : « les rats », comme les a appelé Sophie Binet, ne quitteront pas le bateau, il faudra donc aller les chercher. Il est temps d’inverser le rapport de force et de les faire payer, en les privant notamment, par l’expropriation et la nationalisation, de leurs pouvoirs économiques et politiques.