La grève du 12 octobre 1925 contre la guerre coloniale du Rif est une date historique. Pour la première fois, le mouvement ouvrier affirme avec force, et sans ambiguïté ses principes anticolonialistes.
Encouragé par l’exemple de la révolution soviétique qui a apporté une réponse nouvelle au problème des nationalités, le Maroc, sous domination coloniale se soulève en 1921. Sous la conduite d’Abd-el-Krim, la région du Rif se proclame indépendante en 1923.
Incapables de détruire la rébellion, la France et l’Espagne mobilisent 350 000 hommes en aout 1925. Sous les ordres de Philippe Pétain, l’armée va imposer une guerre coloniale totale et sauvage. L’artillerie, l’aviation, le gaz chimique sont utilisés pour anéantir les villages et leurs populations civiles.
En métropole, tout a été mis en œuvre depuis des décennies, dès l’école primaire, pour faire pénétrer l’idéologie colonialiste dans tous les esprits. La bourgeoisie française et son Empire s’appuient ainsi sur les préjugés chauvins et racistes pour empêcher le développement de tout mouvement de solidarité.
Toutefois, une nouvelle période de l’histoire s’est ouverte après la Première Guerre mondiale et la Révolution d’Octobre : le mouvement ouvrier va rompre avec l’opposition en paroles à la politique colonialiste.
Ainsi, un Comité Central d’Action contre la guerre coloniale du Rif, est constitué en mai 1925 par le Parti communiste, les Jeunesses Communistes, la CGTU, l’ARAC et organise d’importants meetings à travers la France.
La grève historique du 12 octobre 1925 contre la guerre coloniale du Rif
Proposée par les ouvriers des usines Citroën, une grève nationale de 24 heures, politique, contre la guerre coloniale, est décidée le 10 octobre par le Comité d’action tandis que le gouvernement mobilise la police contre les distributeurs de tracts, poursuit ou saisit les journaux qui soutiennent la campagne et la grève.
Malgré une mobilisation policière considérable, 900 000 travailleurs font grève le 12 octobre contre la guerre et manifestent. Deux ouvriers grévistes sont assassinés, dont André Sabatier, un jeune militant communiste de la CGTU. Le 17 octobre, 100 000 Parisiens et Parisiennes assistent à ses obsèques.
La répression est sévère contre cette lutte qui, malgré son caractère minoritaire et novateur, a entrainé la plus grande majorité des travailleurs dans certains puits du bassin minier du Nord, et de façon presque générale, sur les chantiers du bâtiment. Des centaines d’ouvriers sont condamnés à des peines variant entre quinze jours et six mois de prison. En novembre 1925, 165 syndicalistes sont encore emprisonnés et 263 poursuivis par des tribunaux.
La campagne du Comité d’action ne mettra pas un terme à la guerre du Rif qui se poursuivra jusqu’à l’écrasement de la rébellion en 1926. Mais, pour la première fois en France, le refus de l’exploitation coloniale aura été traduit en actes concrets.
A contre-courant de la société, les grévistes d’octobre 1925 ont marqué de leur empreinte l’histoire sociale et politique française et ouvert la voie à l’internationalisme prolétarien.