Le cargo saoudien Bahri Yanbu a accosté jeudi 6 février à Cherbourg sur un quai surveillé par des policiers et des fusiliers commandos. Selon des manifestants venus protester devant les grilles d’accès, des véhicules blindés légers ont été chargés à bord du navire.
Dans un communiqué diffusé dès le mardi 4 février, des syndicats, des associations, des partis et mouvements politiques avaient dénoncé l’arrivée imminente du cargo saoudien Bahri Yanbu à Cherbourg.
Comme le rappelle le communiqué, le Bahri Yanbu, « c’est ce même navire qui a fait l’objet d’une surveillance particulière en mai 2019 et qui s’est vu refusé d’embarquer sa cargaison (à l’époque des canons et des munitions) au Havre et à Marseille. »
Selon plusieurs ONG, ce navire, appartenant à la compagnie saoudienne Bahri, doit profiter de son escale dans le port normand pour charger à son bord des armes et des munitions destinées à l’armée saoudienne. Les ONG dénoncent la potentielle (et probable) utilisation de cet armement Made in France dans la sale guerre menée au Yémen par la pétromonarchie saoudienne.
« Même si cela se passe dans une indifférence quasi-générale, il n’est un secret pour personne que l’Arabie saoudite livre […] une guerre sans merci au peuple Yéménite, perpétrant des atrocités sans nom contre un peuple sans défense. », dénonce notamment le communiqué.
Pour les organisations syndicales, associatives, politiques, le message exprimé est clair : « Nous ne pouvons accepter que le port de Cherbourg puisse servir ce conflit, au nom des intérêts particuliers des marchands ‘armes et de leurs clients ».
« La France fait partie des 5 premiers pays « vendeurs d’armes », il est du devoir de tout citoyen d’intervenir pour empêcher un tel commerce, d’autant plus quand il sert à opprimer de peuples. », ajoutent-ils, appelant les habitants à rester vigilants et réactifs dans les jours à venir. Un premier rassemblement a d’ailleurs été organisé dès le lendemain, mercredi 5 février. Deux autres rassemblement ont été organisés le 6 février.
Depuis 5 ans, l’Arabie saoudite mène une guerre asymétrique au Yémen, un conflit lié aux tensions géopolitiques régionales entre la pétromonarchie et l’Iran. Depuis 2015, Riyad est à la tête d’une coalition régionale et dirige cette intervention militaire qui a fait des dizaines de milliers de morts, et plus de trois millions de déplacés, d’après les Nations unies.
Selon l’ONU, il s’agit de «la pire catastrophe humanitaire actuelle ». Les souffrances du peuple yéménite sont également aggravées par l’envolée des prix et la pénurie d’eau, ainsi que par une situation de famine endémique et une épidémie de choléra.
Un groupe d’experts de l’ONU sur le Yémen a par ailleurs publié en septembre 2019 un rapport faisant état de « multitude de crimes de guerre » commis au Yémen et mentionnant « des raids aériens, des tirs d’obus aveugles, des francs-tireurs, des mines antipersonnel, des meurtres, des détentions, des actes de torture [et] de violence sexuelle ».
Si le rapport ciblait en particulier les crimes de l’armée saoudienne, les experts épinglaient également les puissances occidentales qui alimentent en armes et munitions la coalition dirigée par l’Arabie saoudite.