Aides publiques aux entreprises, omerta et mensonges d’Etat
La décennie politique qui s’est écoulée aura bien été celle du pillage éhonté et à grande échelle des caisses publiques par le patronat, avec la complicité active de l’Etat profond.
Depuis quelques mois, le mur du silence se fissure. Le débat monte autour des aides publiques aux entreprises, de leurs efficacités, et du grevage des finances de l’Etat – dans un contexte de coupes dans les dépenses sociales et d’attaques démagogiques à tout va contre les chômeurs, les pauvres, les allocataires du RSA.
La réalité des aides publiques et la preuve de la collusion patronale-gouvernementale
Des enquêtes, notamment de Médiapart et de l’Humanité ont permis de cerner un peu plus l’ampleur du dégât, à savoir qu’un tiers du budget de l’Etat part chaque année dans les poches des actionnaires et des grandes fortunes du pays.
Bien entendu, à l’omerta et l’opacité (d’Etat!) sur le scandale que représente cet assistanat massif, discrétionnaire et au service exclusif des grands groupes et de leurs actionnaires et propriétaires, s’ajoute la complicité active des journalistes de préfecture qui ont agité, agitent, et agiteront le spectre du « complotisme » tant la petite caste au pouvoir s’est habituée à un train de vie hors sol et insupportable pour des millions et des millions de Français écrasés par la précarité, le chômage, les bas salaires, la dégradation de la protection sociale et des services publics.
Car, oui, l’oligarchie et ses relais médiatiques ne veulent pas lâcher la poule aux œufs d’or. Dans le même temps, ils veulent imposer budget austéritaire sur budget austéritaire sous prétexte de « dérapage des comptes publics », « dérapage » dont ils sont seuls responsables et bénéficiaires exclusifs.
Quelques milliers d’ultrariches siphonnent les comptes de l’Etat
Deux journalistes du Nouvel Observateur, dans un livre intitulé « le Grand détournement », ont récemment enfoncé le clou et chiffrent à 270 milliards par an le montant des aides aux entreprises : « C’est l’histoire d’un hold-up. Sans arme ni violence, mais orchestré avec l’aval des gouvernements successifs depuis trois décennies. »
Dans cet ouvrage, les auteurs ont cherché à recenser les trois formes d’aides que sont les exonérations de cotisations, les subventions directes et les niches fiscales. Selon leurs recherches, les aides aux entreprises ont explosé depuis 2001. Alors qu’elles représentaient déjà 30 milliards par an dans les années 1990, elles ont atteint de nouveaux records à chaque nouveau gouvernement. Elles représentent désormais 270 milliards par an.
En clair : les travailleurs, qui subissent déjà l’exploitation capitaliste et le vol du fruit de leur travail, sont contraints de compenser les effets de la crise d’un système capitaliste à bout de souffle, par la ponction contrainte et opaques des caisses publiques par l’Etat et les gouvernements au profit des actionnaires et des patrons.
Ajoutons qu’il s’agit aussi, au travers des budgets austéritaires ET militaristes, de faire payer au Peuple la facture du réarmement massif et colossal engagé par l’Etat français, au bénéfice, là encore exclusif, du patronat de l’armement et du complexe militaro-industriel.
Soulignons enfin ce chiffre effarant relevé par les journalistes du Nouvel Observateur : les cotisations patronales représentaient autrefois 45 % du salaire brut d’un salarié payé au SMIC, aujourd’hui cette part est tombée à 6,9 %. Une illustration éclatante de la lutte des classes en France.
Mensonges d’Etat
Nié par la presse patronale, le scandale des aides publics explique en partie le « dérapage des comptes publics », ce qui n’empêche pas les ultra-libéraux d’utiliser cet argument pour justifier les coupes dans les dépenses publics,
Une lettre confidentielle révélée cet automne a démontré que Bruno Le Maire avait averti Emmanuel Macron de l’insincérité du budget 2024, avec 40 milliards d’euros de déficit supplémentaire. L’ancien ministre de l’Économie affirme par ailleurs avoir alerté à plusieurs reprises l’Élysée sur le dérapage des comptes publics en 2023 et 2024.
Bien entendu, personne ne peut croire Bruno Le Maire quand ce dernier affirme qu’il n’arrive toujours pas à expliquer la soit disant énorme erreur d’estimation de Bercy dans le calcul des recettes : 20 milliards de différences.
Oui, ces mensonges, car il s’agit bien de mensonges organisées au plus haut niveau de l’Etat, ont porté atteinte à la sincérité des budgets présentés et, il faut le dire, aux élections législatives anticipées de 2024.
Tout est lié, la politique pro-patronale (qui justifie tous les excès) a explosé tous les compteurs jusqu’au dérapage budgétaire « de trop » : le pillage prolongé et avide des comptes publics doit être caché et compensé par une austérité XXL : en clair, les travailleurs et les travailleuses doivent payer pour garantir les profits d’une poignée de parasites.
Pour rappel, en 2023, le solde budgétaire de l’Etat s’établissait à -173,0 milliards d’euros tandis qu’en 2024, il s’élevait à -155,9€ milliards d’euros. Sous Emmanuel Macron, la dette de la France culminait à la fin du premier trimestre de 2025 à 3.345,4 milliards d’euros, soit 113,9% du PIB.
Reprendre le contrôle de nos vies
La politique pro-patronale a des effets très concrets sur nos vies quotidiennes et les capacités des uns et des autres à vivre une vie digne, sans précarité ni peur du lendemain. Le budget 2025 représente, comme celui des années précédentes, des « cures » violentes austéritaires.
A l’exploitation « ordinaire » capitaliste s’ajoute donc non seulement la ponction illégitime et non consentie des ultrariches et des patrons dans « le pot commun » mais aussi tout un appareil sécuritaire et répressif (police, justice, médias mais aussi CAF, France Travail…) chargé de faire respecter l’ordre social et la dégradation brutale de nos conditions de vies.
Il nous faut donc reprendre la main sur nos propres vies et sur la société toute entière. Et cela passe par renverser l’ordre social et politique, déséquilibré et injuste. Il faut donc imposer la justice sociale et fiscale maximale, et la démocratie totale. Nous pouvons et nous devons mener de front deux luttes liées entre elles : imposer l’augmentation des salaires (+ 300 euros pour tous et toutes), le retour à l’âge légal de départ à la retraite à 60 ans (55 ans pour les métiers pénibles) et l’interdiction de tous les licenciements. Et, dans le même temps, convaincre partout que c’est par l’abolition de l’exploitation de l’homme par l’homme que nous parviendrons à imposer une société de justice sociale intégrale, dirigée par les créateurs des richesses, les travailleurs et les travailleuses eux-mêmes.

