Le 25 aout 1944, les troupes d’occupation hitlériennes se rendent, Paris est libéré, non par les GI américains, ni même par la 2ème DB du général Leclerc, mais bien par une insurrection populaire qui fait suite au mot d’ordre de « grève générale insurrectionnelle » lancée par la CGT depuis le 10 août.
Malgré le révisionnisme ambiant, il est de notre devoir de le rappeler : c’est la classe ouvrière en armes qui a libéré Paris. Tout commence le 10 août 1944, par l’appel à la grève insurrectionnelle lancée aux cheminots.
Créée à la veille de la guerre, le 1er janvier 1938, dans la foulée du Front populaire, la Société Nationale des Chemins de fer français, est la plus grosse entreprise de France avec ses 500 000 cheminots, munis d’une forte identité ouvrière collective : 8 cheminots sur 10 sont syndiqués, dont près de 80 % à la CGT réunifiée, même si la majorité des syndicats cheminots avaient rejoints la CGTU en 1921, ce qui fait que l’influence communiste y est très forte.
Sous le régime de Vichy et l’Occupation, les Confédérations étaient interdites, la « révolution nationale » de Pétain voulait imposer la « charte du travail » comme outil de collaboration de classe dans les entreprises.
De par la forte influence communiste dans leur corporation et la puissance de la CGT illégale, les cheminots formeront la branche professionnelle la plus représentée dans la Résistance.
De plus, en raison de l’importance stratégique des chemins de fer dans le pays et les facilités de circulation dont ils disposent, le fait qu’ils soient amenés à franchir la démarcation entre zone « libre » et zone occupée, explique que l’importance de la résistance de cette corporation soit capitale dans les réseaux de résistance (passage d’armes et de courriers, évacuation de résistants ou de juifs, sabotages…).
La grève cheminote du 10 août arrive en conclusion de 4 années de « bataille du rail » qu’ils ont payé cher : un millier de fusillés au assassinés, plus de 1100 morts en déportation, des milliers d’arrêtés, torturés, révoqués, en tout près de 8000 cheminots victimes des troupes d’occupation, dont Pierre Sémard, ancien secrétaire général du PCF et de la Fédération CGT des cheminots, fusillé par les nazis.
Le 10 août 1944, le comité central de grève des cheminots lance la grève insurrectionnelle contre l’occupant nazi, il s’agit là d’une des plus belles pages de l’histoire ouvrière internationale.
Ainsi, dans les dépôts et ateliers, le mot d’ordre est « grève insurrectionnelle pour libérer Paris, plus un train pour les nazis. » A l’approche des armées alliées, paralyser les troupes d’occupation en région parisienne représentait en effet un enjeu vital.
La grève insurrectionnelle et la Libération de Paris
La grève avec occupation armée commence aux ateliers de Montrouge, puis s’étend avec l’appuis de l’UD CGT du Val de Marne, au triage de Villeneuve-St-Georges, aux ateliers de Vitry et d’Ivry.
Le 13 août, 3 000 agents de la Compagnie du Métropolitain cessent également le travail, de même aux PTT. La grève se généralise ensuite créant de grosses difficultés pour les troupes hitlériennes en plein repli.
De plus, la réussite de la grève des cheminots et des traminots donne confiance à de nombreuses entreprises et professions qui entrent également dans la grève insurrectionnelle et vont participer en particulier aux combats pour la libération de Paris (bus, métros, électriciens et gaziers et enfin police).
Le 17 août, trente-sept résistants sont massacrés par les troupes d’occupation à la cascade du bois de Boulogne. Ce même 17 août, le Comité parisien de libération, présidé par le cégétiste André Tollet, décide de passer à l’insurrection.
Le 18, tout bascule : CGT et la CFTC lancent un mot d’ordre de grève générale, les élus communistes appellent à l’insurrection. A partir de là, les combats ne cesseront plus et le 21 août, la presse résistante paraît au grand jour.
Le 25 août, avant l’arrivée de Leclerc dans Paris, les troupes d’occupation signe leur reddition sans conditions en gare Montparnasse : tout un symbole….
« C’est dans l’action des cheminots pour la libération des leurs qu’est montée l’idée de la grève » rappelait André Tollet, président du Comité parisien de libération.
La grève insurrectionnelle marque aussi l’aboutissement de l’action décisive de la résistance ouvrière en général, bien sûr pour la libération du territoire du joug nazi, mais aussi pour arracher des conquêtes sociales et démocratiques de haut niveau (telles la SECU, les CE ou les nationalisations), grâce à la place qu’ont eu la CGT et le PCF au sein du Conseil national de la Résistance.