La CGT appelle à trois journées de grèves, actions et manifestations interprofessionnelles les 29, 30, 31 janvier pour poursuivre et amplifier la mobilisation contre la réforme des retraites. Après presque deux mois de mobilisation sociale, comment faire pour élever le rapport de force jusqu’au retrait de la réforme des retraites ?
Premier constat : la mobilisation ne faiblit pas
Plus de 50 jours ont passé depuis le début du mouvement social contre la réforme des retraites. Si la grève chez les traminots et les cheminots a logiquement baissé en intensité et si l’extension de la grève reconductible n’a pas encore connu d’élargissement suffisant, d’autres secteurs comme l’Energie ont pris une forme de « relais » en organisant notamment de multiples actions d’éclat.
De même, les opérations « ports morts » impulsées par la Fédération nationale CGT des Ports et docks, ou les blocages d’expéditions de produits pétroliers dans les raffineries, ont permis de rappeler que les cheminots et traminots n’étaient pas seuls dans le combat. Enfin, la réussite de la mobilisation du 24 janvier a redonné espoir et confiance dans la poursuite d’un mouvement social inédit et qui rebat les cartes, notamment au niveau syndical.
Le soutien de l’opinion publique envers le mouvement social, loin de baisser, s’est même amplifié ces derniers jours, et ce malgré un matraquage médiatique quotidien et insupportable. 66% des sondés considèrent que le mouvement est justifié, et 60% des sondés soutiennent la grève. La ridicule séquence de pas de deux entre le gouvernement et Laurent Berger au sujet de l’âge pivot n’aura donc en rien réussit à faire avaler la pilule aux Français.
Enfin, si le gouvernement joue l’essoufflement de la grève, certains signes tendent à accréditer que nous sommes très loin de la fin de ce mouvement social. La recherche d’un second souffle a d’ailleurs déjà révélé que cette lutte sociale était bien une bataille à caractère politique, et idéologique et que la protection sociale était considérée à juste titre comme un enjeu politique de choix de société.
Second constat : le gouvernement est fébrile
L’arrogance dont font preuve nos gouvernants ne doit pas nous induire en erreur ; derrière la suffisance et la morgue il y a bien une fébrilité au sommet de l’Etat.
La présentation d’un texte législatif incomplet à l’Assemblée nationale, les remises en cause formulées par le Conseil d’Etat quant au sérieux de l’étude d’impact, le maintien d’un âge pivot à non plus 64 ans, mais bien 65 ans pour les générations nées après 1980, démontrent que le gouvernement ferme les yeux et accélère pour passer en force coûte que coûte.
Il y a d’ailleurs lieu de s’interroger sur cette stratégie kamikaze du pouvoir. Nos gouvernants sont en mission pour dépecer et vendre au privé le maximum de nos conquis sociaux, écraser par la force si nécessaire toute contestation à l’ordre néolibéral. En réalité, le pouvoir joue un jeu dangereux pour lui-même à force de désespérer ceux et celles qui se retrouvent plongées dans une précarité à vie.
Il faut dire que le socle de soutien au président et au gouvernement est très minoritaire. Rappelons que Macron et consorts ont été élus par une minorité agissante de la population (la bourgeoisie), dans le cadre du hold-up électoral de 2017. Jamais aucun président, gouvernement ou encore parlement n’auront eu une légitimité aussi fragile. Cela peut d’ailleurs expliquer le caractère autoritaire d’un pouvoir isolé, coupé de la réalité du pays, et protégé par une police transformée en garde prétorienne surarmée et opérant dans l’opacité et l’impunité.
Cet isolement, et la détestation absolue de Macron par une majorité grandissante de Français, sont à bien des égards des raisons supplémentaires qui aurait dû pousser la CGT à ne surtout pas participer à la pseudo conférence sur le financement des retraites prévue le 30 janvier.
Troisième constat : le pouvoir craint notre force, notre unité, nos capacités collectives d’actions
Alors que certains apprentis sorciers cherchent à manipuler des milliers de manifestants et à les envoyer dans un mur en glorifiant des affrontements de rue inutiles et asymétriques avec les forces de l’ordre, rappelons ici que la grève dans l’entreprise est l’instrument primordial pour gagner l’abandon de cette réforme.
Comme le rappelle régulièrement la CGT et ses organisations, la grève est l’arme des travailleurs, un outil de pression, de blocage de l’économie, le moyen de rendre le pays ingouvernable.
Dans un communiqué paru le 20 janvier, la Fédération nationale des Industries Chimiques CGT affirmait par exemple : « Nous ne pouvons pas laisser ce pays être ce qu’il est devenu, un nouveau laboratoire du capitalisme ultralibéral. Nous appelons à continuer à rendre ce pays ingouvernable par la classe sociale qui détient les moyens de production, les médias et les rênes du pouvoir. »
Disons-le clairement : la grève par procuration amène à la défaite. La question est bien de savoir comment amplifier la mobilisation en entrainant le maximum de travailleurs, le maximum de secteurs, dans la grève et la paralysie économique du pays.
Une seule perspective de victoire : par la grève, rendre le pays ingouvernable
Nous devons être à la hauteur de ceux qui nous précédés, nos parents, nos grands-parents, qui se sont battus, sont morts, pour que nous ayons droit à une protection sociale, et ce quelle que soit notre catégorie professionnelle, où chacun paye selon ses moyens et reçoit selon ses besoins.
Alors que la CGT appelle à la mobilisation et à la grève interprofessionnelle les 29, 30, 31 janvier, allons-nous baisser les bras pour nos propres retraites et laisser nos enfants et nos petits-enfants crever au travail ?
Le soutien de l’opinion aux grévistes, majoritaire dans la population et qui traduit un refus de la régression sociale, doit maintenant évoluer de passif à actif, par l’entrée en grève de nouveaux pans entiers de la population. La confiance dans la lutte et dans la victoire passe par l’engagement individuel et collectif de chacun d’entre nous.
Tout est possible, si nous rappelons tous ensemble et en même temps « qui » produit les richesses du pays et si nous montrons que c’est le Peuple et non une élite coupée des réalités qui doit commander.
Tout est possible si les travailleurs s’unissent dans le cadre interprofessionnel de la grève générale contre la réforme des retraites et agissent et pèsent sur l’économie de toutes leurs forces.
Tout est possible si l’élévation du rapport de force amène les patrons, seuls maitres de l’économie et réels détenteurs du pouvoir politique, jusqu’au point de rupture.