Face au coronavirus, les appels à l’union nationale masquent mal le gigantesque tour de passe-passe financier et budgétaire en cours. C’est au patronat de payer la crise économique, sociale et sanitaire, pas aux travailleurs ou au contribuable.
Emmanuel Macron l’a répété plus de huit fois au cours de son allocution du 16 mars : « nous sommes en guerre » contre un « ennemi invisible ». Conséquence immédiate de cette rhétorique guerrière, l’appel à l’union nationale ne choquera que le naïf. Tout comme l’ouverture des vannes financières en direction des entreprises. Selon le président le plus illégitime et détestable depuis Louis Philippe Bonaparte, « l’Etat paiera ».
Au cours des jours et semaines à venir nous assisterons sans doute à une multiplication des appels à cette « union sacrée », notamment pour faire passer la pilule financière des nouvelles subventions publiques accordées au patronat. On nous demandera de faire un effort collectif, de ne pas alimenter des divisions politiques et sociales dans le pays. Pourtant, nous ne sommes pas tous dans le même bateau et nous ne le serons jamais.
Si le virus lui-même ne fait pas de distinction de classe, la santé et la sécurité au travail demeurent des questions sociales traversées par les rapports de force et les rapports de classe. Le maintien du travail dans les usines et dans la production industrielle démontre que les profits des patrons ne sont jamais placés en quarantaine, contrairement aux droits des travailleurs.
De même, pour le moment, aucunes mesures concrètes n’ont été annoncées pour permettre un fonctionnement correct de l’Hôpital public. Rappelons d’ailleurs qu’en avril 2019, Christophe Prudhomme, porte-parole d’un syndicat d’urgentistes, expliquait que près de « 100 000 lits » avaient été fermés en 20 ans.
Les actions de grèves spontanées ou préparées, les débrayages massifs dans les usines italiennes, espagnoles, françaises sont à encourager et développer. Des milliers de salariés des entreprises du secteur industriel et de distribution ont déjà invoqué leur droit de retrait, au motif que leur entreprise ne respectait pas les instructions de sécurité.
Car, non, les ouvriers et les patrons ne sont pas dans le même bateau. Ce n’était pas le cas avant la crise, ce n’est pas le cas actuellement, et cela ne sera pas le cas après la crise.
Au « jour d’après », on nous demandera de rester unis, d’accepter les annulations de cotisations sociales, d’accepter les mesures de chômage partiel ou total, de faire « ensemble » les sacrifices « nécessaires », sans questionner le pourquoi du comment. On nous demandera d’être responsables et d’être productifs pour le bien du pays.
La récession économique risque d’avoir un impact comparable à la crise de 2008 et ce sont les travailleurs qui en paieront le prix. Les milliers de milliards de dollars et d’euros d’argent public (donc payés par l’ensemble du peuple français) littéralement donnés aux entreprises, l’augmentation de la dette publique, seront payées par les classes populaires au travers de nouvelles politiques d’austérité. Comme si depuis des années les gouvernements successifs de gauche et de droite n’avaient pas déjà détourné des fonds publics au profit des grandes entreprises, notamment au travers du mécanisme CICE…
Ce nouvel hold-up, véritable casse du siècle, ne doit pas passer. Tout comme les restrictions de nos droits sociaux et politiques, individuels et collectifs. Ce n’est pas aux travailleurs de payer la crise capitaliste.