FSU et CGT, déjà fiancés, bientôt mariés ?
Déjà fiancés, bientôt mariés ? En violation totale des décisions du 53e Congrès de la CGT, la direction confédérale CGT, main dans la main avec la direction de la FSU, semble acter la fusion, à terme, de la CGT et de la FSU.
En ce début d’année 2024, les organisations CGT et les syndicalistes CGT ont ainsi pu découvrir dans la presse les éléments de langage distillés par la direction Confédérale CGT pour faire avaler, sinon la pilule, du moins le principe de « rapprochement » avec pour objectif avoué l’éclosion d’une nouvelle force syndicale. Bien entendu, dans ces articles de presse, les dirigeants de la CGT et de la FSU s’échinent à promettre et le respect des démocraties internes, et le suivi d’une feuille de route détaillée.
On apprend notamment dans le journal l’Humanité, que la CGT et la FSU ont multiplié les rencontres depuis le 10 juillet : « Le 14 novembre, ces deux organisations se sont arrêtées sur une feuille de route, dont l’application sera confiée à des groupes de travail dans les directions respectives.
« […] Et elles ont établi un calendrier commun : l’année 2024 sera consacrée à la bataille sur l’inflation, tout en associant les structures des deux centrales dans la démarche de rassemblement. Ces travaux se poursuivront en 2025, avec un point d’étape au congrès de la FSU et, en 2026, lors du congrès de la CGT et des élections dans la fonction publique. Un bilan sera dressé en 2027. »
A l’image du tour de passe-passe concernant la transformation de l’alliance controversée « Plus Jamais ça » en une nouvelle structure, la méthode utilisée pour – sciemment – contourner les décisions du 53e Congrès pose question. Nous rappelons ici que, pour calmer la colère des Congressistes, Philippe Martinez, Marie Buisson et la direction sortante avaient été contraints à un exercice d’autocensure dans le document d’orientation pour éviter une nouvelle humiliation publique après le rejet du bilan d’activité.
Certains paragraphes – les éléments les plus en contraction avec les bases CGT (et les principes de fonctionnement de la CGT, dont bien entendu le fédéralisme) – présents initialement dans le document d’orientation avaient ainsi purement et simplement été supprimés ou largement vidés de leur contenu.
La direction actuelle, en partie issue de la précédente direction, ne peut, en aucun cas, s’assoir comme elle le fait actuellement, sur les décisions du Congrès. La feuille de route préparée, et qui fait écho au pire style macronien en termes d’enfumage général, doit être dénoncée et abandonnée.
Au lieu de rechercher l’unité dans l’action, notamment par la grève (chacun a en mémoire le mouvement social contre la réforme des retraites), et de reconstruire ce qui a fait la force de la CGT, – le fédéralisme, l’orientation politique, la double besogne et la capacité d’action –on cherche à nous entrainer dans un processus qui, d’expérimental deviendra irrécusable. Ce processus, bien loin de générer un cercle vertueux, est un frein pour le développement de notre CGT et pour le développement et le renforcement des luttes, notamment unitaires.
Le raisonnement simpliste du « ensemble on est plus fort » a pourtant du plomb dans l’aile depuis la mobilisation contre la réforme des retraites, portée à bout de grèves par la CGT « avec une intersyndicale-unie-déterminée » qui s’est refusée jusqu’au bout à envisager la grève interprofessionnelle reconductible pour gagner la bataille contre le gouvernement.
Les différences de contenu politique, d’orientation, d’organisation (fonctionnement par tendance dans le cas de la FSU, organisation par métier dans la CGT) ne sont certainement pas à prendre à la légère et il est à gager, comme pour tout le reste, que ce n’est pas la FSU qui sera « convaincue » de changer mais bien la CGT qui « s’adaptera » pour rendre possible la fusion qui, au passage, semble avant tout motivée par les échéances électorales dans la Fonction publique, et donc par l’institutionnalisme. Là encore, une différence de taille entre les appréciations cégétistes et la vision du rapport de forces pensée par la FSU.
Les différences organisationnelles et divergences politiques entre les deux organisations ne pourront, dans la réalité, qu’être considérées comme des prétextes pour faire disparaitre un syndicalisme CGT spécifique et unique. Comme souvent, on nous propose un remède (à des vraies difficultés) qui ne pourra que tuer le patient.
Une telle fusion dynamiterait en effet les équilibres internes dans la CGT (est-ce l’objectif recherché ?) et bouleverserait (sans processus des luttes, donc de manière hors sol) la composition sociale de la plus ancienne Confédération ouvrière de France. La boucle serait ainsi bouclée, la longue marche entamée il y a 30 ans par les directions réformistes s’achèverait enfin par la création d’une nouvelle organisation syndicale qui ne serait plus l’organisation syndicale de référence de la classe ouvrière.