« Ni de camp fermé, ni de camp ouvert sur les îles » : pour la troisième journée consécutive, l’appel à la grève générale dans les îles grecques de la mer Egée lancé par le syndicat de classe PAME et des associations de commerçants a été largement suivi.
Des milliers de personnes ont de nouveau manifesté à Lesbos, Chios et Samos le jeudi 27 février contre le gouvernement grec et son projet de construction de nouveaux camps de rétention pour migrants dans ces îles situées à proximité de la frontière avec la Turquie.
La veille, de violents incidents ont eu lieu, opposant les habitants à des centaines de policiers anti-émeutes débarqués par bateau pour accélérer la construction des nouveaux camps fermés. Plusieurs dizaines de policiers ont notamment été blessés au cours de ces affrontements, qui ont fait grand bruit en Grèce.
Face à l’ampleur et à la vigueur de la mobilisation populaire, les forces de l’ordre ont été contraintes de quitter les îles.
Des îles grecques transformées en prisons géantes pour migrants
Le projet du gouvernement grec est de créer des camps fermés (pour 20 000 places supplémentaires) sur les cinq îles de la mer Égée : Lesbos, Samos, Chios, Kos et Leros, où vivent, ou plutôt survivent, dans des conditions scandaleuses plus de 40 000 migrants alors que les centres officiels ne comptent que 6 200 places.
Enfermés sur ces fameux « hot spots », des prisons-bidonvilles à ciel ouvert, les demandeurs d’asile sont en majorité des femmes, des enfants, des adolescents et des mineurs non accompagnés. Ces 40 000 personnes, qui ne souhaitent pas rester en Grèce, pays transit sur la route vers l’Europe occidentale, restent donc prisonniers dans des camps surpeuplés où règnent mafia, arbitraire et loi du plus fort.
Pour construire ses nouvelles prisons, le gouvernement n’entend ni écouter les doléances des populations insulaires, ni accorder le droit d’accueil ou de passage aux migrants. L’annonce de la réquisition de terres, en vue de la construction des nouveaux camps, a suscité la colère des communautés locales qui ne veulent plus voir leurs îles transformées en prisons géantes. Par ailleurs, les mairies ont appelé à ce « qu’aucune entreprise ne vende la moindre brique aux constructeurs venus d’Athènes bâtir ces camps ».
Sur ce sujet comme sur d’autres, la complicité de l’Union européenne et de ses Etats-membres ne fait pas l’ombre d’un doute. En Turquie comme en Grèce ou en Libye, la stratégie menée par l’UE est la même : bloquer et enfermer les immigrés aux portes de l’Europe, disposer d’une réserve supplémentaire de mains d’œuvre, faire monter le nationalisme, le racisme et la division entre les travailleurs.
PAME : « Pas de camps sur les îles, ni fermés ni ouverts, nos îles ne deviendront pas des prisons de l’UE! »
Dans un communiqué, le syndicat de classe PAME a dénoncé « l’attaque criminelle du gouvernement contre les résidents de Lesbos, Samos et Chios. »
« La mise en œuvre des accords Turquie-UE par les gouvernements grecs n’a non seulement pas amélioré la situation, mais l’a rendue encore plus insupportable, tant pour les réfugiés migrants que pour les insulaires. Les choses vont empirer avec l’intensification de la concurrence dans la région, [la Grèce] est de plus en plus impliquée dans les guerres et les interventions des États-Unis et de l’OTAN qui provoquent l’exode de des milliers de réfugiés.
Le gouvernement non seulement ne satisfait pas les demandes légitimes des insulaires, qui exigent la libération des milliers de personnes déracinées de leurs pays d’origine, mais il répond aussi par l’envoie des forces de police débarquant sur les îles en tant « qu’armée d’occupation » contre la détermination du peuple à ne pas le laisser accomplir ses objectifs impopulaires.
La détermination manifestée par le mouvement syndical avec l’action organisée des Bourses du travail et des syndicats peut être le véritable bouclier du peuple contre l’oppression et le terrorisme.
Le PAME et toutes ses organisations membres, résolument déterminées à défendre les intérêts des grecs et des immigrants contre les politiques qui paralysent leur vie, continueront de se battre jusqu’à ce que les projets du gouvernement et de l’UE soient abrogés.
La responsabilité du gouvernement dans le développement d’un mécanisme terroriste répressif en tant qu ‘ »armée d’occupation » sur les îles est énorme. Les syndicats, les travailleurs et le peuple s’opposeront à eux. »
Pour rappel, dès le début de ce que les médias bourgeois et les politiciens ont appelé « crise migratoire » en 2015, le syndicat de classe PAME rappelait que « nous sommes frères quels que soient notre pays, notre religion ou notre race. Nous sommes frères et sœurs parce qu’ensemble nous souffrons des guerres impérialistes et de la pauvreté, du chômage et du coût de la vie. »
Le PAME avait dès ce moment formulé clairement ses revendications en direction des réfugiés-migrants :
- « Une solution immédiate au problème de l’hébergement [des travailleurs migrants] et des conditions de vie décente le temps qu’il faudra avant [leur] départ pour [les] destinations [de leurs choix], notamment par la mise à disposition d’interprètes, d’un suivi médical, de nourriture, d’une aide juridique…
- Que soit attribué l’asile politique ou une autre protection à tous les réfugiés, victimes des guerres et interventions impérialistes, par des procédures rapides, fiables et justes.
- La non-implication de notre pays dans les plans impérialistes des Etats-Unis, de l’OTAN et de l’Union européenne. »