« Guerre commerciale » : refusons l’« Union sacrée »

« Guerre commerciale » : refusons l’« Union sacrée »

Le déploiement par l’administration Trump de mesures fortes et brutales sur les droits de douanes, puis son volte-face devant l’effondrement des marchés financiers, a été l’occasion de constater l’état de mort cérébrale d’une partie de la gauche et du mouvement syndical, surprise la main dans le sac, à, laborieusement, défendre le libre-marché face à la rupture du statu quo économique et géopolitique.  

Pourtant, la « fin de l’Histoire » après les contre-révolutions en URSS et dans les pays socialistes, tout comme « la mondialisation heureuse » et un « monde sans usines » n’étaient pas des fables mais bien des mensonges répétés encore et encore, malgré l’évidence.

La guerre commerciale XXL, déclenchée puis suspendue par Donald Trump (à l’exception des mesures drastiques antichinoises), existe déjà dans les faits. Trente années de doctrines ultralibérales ont fini par imposer un prisme de vue strictement pro-marché et ouverture (économique et financière) des frontières.

 Une illustration parmi d’autres : la présidente de la Commission, la va-t’en-guerre Ursula von der Leyen a souligné « la responsabilité de l’Europe et de la Chine » pour « soutenir un système d’échanges réformé, libre, équitable et fondé sur des conditions de concurrence égales ». Le journal patronal Les Echos rapporte également que le premier ministre chinois, Li Qiang a de son côté affirmé que « la Chine et l’UE doivent renforcer leur communication et leur coordination ». Les deux blocs tiendront un sommet bilatéral avant l’été.

C’est pourquoi, aussi, nous ne pouvons que tancer les propos publics de Sophie Binet, secrétaire générale de la Confédération CGT, qui appelle le gouvernement à constituer, avec les organisations patronales et syndicales, une « cellule de crise » face à la guerre commerciale et aux ondes de chocs économiques et politiques à travers le monde.

« Le patriotisme économique, c’est nous qui le portons. Il faut donc associer les premiers concernés, les salariés » à la réflexion, affirmait-elle  jeudi matin sur France 2. Inutile de préciser que nous nous scandalisons de cette petite phrase qui, placé là, accélère le recentrage politique et institutionnel de la CGT et participe à l’intégration de notre Confédération dans l’Union sacrée.

Pourtant, en réalité, le capitalisme n’a pas attendu Donald Trump pour entremêler et entrelacer le protectionnisme et le libre-échangisme. Le capitalisme n’est pas autre chose qu’une guerre permanente, larvée ou intense, par procuration ou directe, militaire ou diplomatique.

Car pour les patrons, en définitive, ce n’est pas l’intérêt général ou collectif comme celui des salariés qui prime mais bien l’intérêt privé. La « défense de l’emploi » est en réalité une conséquence indirecte (et pas toujours effective) de certaines mesures dites protectionnistes.

C’est pourquoi il faut retourner l’argument. Pour protéger réellement les intérêts des travailleurs, le protectionnisme n’est pas adapté tant que son objectif est de « protéger l’économie », c’est-à-dire le patronat, et tant que les machines, les usines, les outils de production demeurent la propriété privée et exclusive d’une poignée de parasites qui utilisent l’Etat comme vache à lait et leurs salariés comme poules aux œufs d’or à pressurer jusqu’à épuisement.

Oui, il faut protéger la France ouvrière et tous les travailleurs et travailleuses. Ces derniers sont en état de légitime défense devant la guerre que lui mène le patronat français et les multinationales américaines, allemandes, chinoises, japonaises, etc… Cette protection passe, en premier lieu, par l’expropriation, sans conditions, de toute l’économie pour la « retirer » du marché, la rupture avec le capitalisme et l’exploitation de l’Homme par l’Homme, et la réponse directe aux besoins des populations exportatrices et importatrices, c’est-à-dire se préoccuper, avant tout, des travailleurs et travailleuses, et non des exportations juteuses que peuvent réaliser telle ou telle enseigne à l’étranger.