Quelle stratégie unitaire avons-nous besoin de construire pour gagner ? Quelques exemples…
Chaque jour, dans les entreprises et services, nous discutons avec nos collègues et nos camarades sur la situation économique et sociale du pays et la nécessité pour les travailleurs de réagir face aux attaques du patronat sur nos salaires, nos conditions de travail, nos emplois.
Alors que les mauvais coups s’intensifient sur notre classe, l’intuition qu’il sera difficile pour un collectif de travail de faire infléchir seul l’agenda réactionnaire d’un patronat radicalisé peut conduire à la tétanie, l’immobilisme et pour finir, la résignation.
Pour dépasser cette résignation, et nous espérons humblement que notre journal y contribue, nous devons donner confiance en notre capacité d’agir. Donner confiance aux travailleurs en leur propre force d’une part et en celle de leurs frères et sœurs d’autre part. C’est une condition indispensable de l’unité et donc de la raison d’être de la CGT.
A l’heure où les communiqués intersyndicaux fleurissent sur à peu près tous les axes revendicatifs majeurs de la CGT, on pourrait penser qu’ils sont les bases nécessaires à cette unité. Pour notre part, nous ne le pensons pas.
L’unité ne se décrète pas, elle se construit autour d’une stratégie revendicative partagée. Pour cette raison, cette stratégie ne peut non seulement pas être autre chose que le résultat de débats internes aux organisations constitutives de l’intersyndicale mais doit également être partagée avec le plus grand nombre possible de travailleurs.
Ces deux éléments sont indispensables pour pouvoir peser sur les échanges avec les autres organisations syndicales. Ce ne sont pas des échanges où chaque organisation compte pour une ou deux voix selon sa taille ou résultats aux élections professionnelles. Ce sont des réunions où la CGT se doit de relayer la colère et les aspirations légitimes des travailleurs.
La mobilisation de 2022-2023 contre la réforme des retraites qui, sur bien des aspects marque un recul par rapport à celle de 2019-2020, illustre parfaitement les dérives d’une unité par le haut, non partagée. Dans sa structuration d’abord avec moins d’Assemblées Générales de grévistes ; dans son contenu revendicatif ensuite où nous avons cédé à l’intersyndicale l’élargissement des régimes spéciaux de retraite au simple maintien du statu quo (qui pèse aujourd’hui gravement sur les expressions de la seule CGT) ; enfin, sur les modalités de la grève décrétées par le haut sans considération pour les fédérations CGT qui avaient pourtant mis au débat la grève reconductible dans le CCN.
Comment construire un processus unitaire de lutte ? Notre journal militant n’a pas pour habitude de donner des « recettes miracles » ou dire que le « bouton rouge » existe. Pour autant, nous n’avons pas non plus pour habitude de critiquer sans apporter notre contribution au débat.
Nous sommes convaincus que c’est bien notre syndicalisme CGT qui possède tous les caractéristiques nécessaires pour construire l’unité et amener les travailleurs vers des victoires.
Un syndicalisme démocratique reposant sur le fédéralisme et la démocratie à la base qui n’est pas dans l’incantation ou les « coups à trois bandes » de dirigeants enfermés dans leur tour d’ivoire mais dans la construction d’un cahier revendicatif déterminé par les travailleurs eux-mêmes ! Un syndicalisme interprofessionnel qui démontre aux travailleurs qu’énormément de points de ces cahiers revendicatifs sont partagés et peuvent être défendus collectivement ! Un syndicalisme revendicatif qui ne nie pas l’importance des instances représentatives mais qui affirme que le rapport de force pour faire appliquer le cahier revendicatif s’exprime en-dehors de celles-ci dans la grève et l’unité !
Il nous faut cultiver notre jardin syndical.
Alors que le coût de la vie explose et condamne des millions de travailleurs, précaires, privés d’emploi, retraités à la misère, nous avons besoin d’une revendication immédiate d’augmentation générale des salaires, allocations et pensions et le rétablissement de l’échelle mobile des salaires indexée sur l’inflation. La campagne salaire de la CGT allait en ce sens avec des cahiers revendicatifs définis dans les entreprises puis débattus collectivement dans les Unions Locales articulant NAO et stratégie unitaire de mobilisation. Cette campagne a été abandonnée dans la perspective d’une mobilisation intersyndicale sur les retraites puis relancée timidement avec la journée de déploiement d’avril 2023 sur les salaires… Une intersyndicale n’est valable, pour nous, que sur la base de nos revendications qui ne souffrent d’aucun compromis puisqu’elles portent l’ambition de justice sociale. Tant mieux si elle est possible, tant pis si elle ne l’est pas. Ce n’est pas l’unité ou l’unification des organisations syndicales, par en-haut, qui est gage de progrès social, mais l’unité des travailleuses et travailleurs !
Alors que le chômage de masse s’enracine autant que les conditions de travail se dégradent, au moment même où le capital s’apprête à liquider notre industrie et nos Services publics, nous devons reprendre le flambeau de la lutte des communards, du droit au travail de chacun pour la réponse aux besoins sociaux de tous ! De la même manière que les camarades du syndicat CGT de l’AP-HP Georges Clémenceau, construisons des cahiers revendicatifs service par service pour que les travailleuses et travailleurs déterminent le nombre de salariés et l’organisation du travail qu’il faudrait dans nos services et entreprises ! Faisons-les converger dans nos Unions Locales et Départementales pour en faire des véritables assises de la reconquête de nos Services publics et industries.
Quand elle prend appui sur ses deux jambes, la CGT est une véritable machine pour arracher des victoires et gagner des nouveaux droits. Pour cela, elle doit être en mouvement et pas sur une position attentiste d’une rencontre avec un nouveau premier ministre issu d’un énième remaniement ministériel d’un pouvoir politique qui, pour répondre aux exigences du patronat, s’enlise dans l’autoritarisme.
Salaire, emploi, retraite : ce sont ces sujets que nous devons débattre avec les travailleurs pour construire une stratégie unitaire de lutte et la faire partager par le plus grand nombre d’organisations syndicales !