« Salariés de la chimie, on est tous dans le même combat ! »
à Pont-de-Claix, près d’un millier d’ouvriers des industries chimiques manifestent pour l’emploi
« Vencorex sera l’épicentre de la lutte » : contre la casse industrielle et pour la défense de l’emploi, près d’un millier de travailleurs ont défilé sur le bassin industriel de Pont-de-Claix, en Isère, le 1er octobre, journée de grève nationale interprofessionnelle. Un succès qui encourage le développement d’initiatives similaires, notamment dans les bassins industriels sinistrés ou menacés par le patronat.
Venus de toute la France à l’appel de la Fédération nationale des Industries chimiques CGT, des centaines d’ouvriers de nombreux sites et de différentes branches des industries chimiques étaient ainsi présents aux côtés des salariés de Vencorex et des deux plateformes de Pont-de-Claix et de Jarrie.
A noter également la présence de l’Union départementale CGT de l’Isère à la manifestation ainsi que la participation d’un certain nombre d’élus locaux.
Propriété d’un groupe pétrochimique thaïlandais, le groupe Vencorex a annoncé en septembre la fermeture de la principale usine de la plateforme chimique de Pont-de-Claix, qui regroupe également d’autres entreprises comme Air Liquide, Segens, Framatom, Suez, Solvay… et impacte et irrigue également la plateforme chimique de Jarrie, située à proximité de Pont-de-Claix.
Vencorex menace de licencier 500 salariés, « nous estimons que 2 000 emplois sont directement en danger, auxquels s’ajoutent 6 000 emplois indirects menacés, pour une sombre perspective de 8 000 emplois détruits. » explique la FNIC CGT qui précise : « [qu’] un véritable tsunami de misère s’abattra sur la région, les travailleurs et leurs familles, nécessitant une réponse collective. »
Un message d’unité ouvrière et de combativité
La manifestation, à l’initiative des syndicats CGT des deux plateformes chimiques du sud-est grenoblois avec la FNIC CGT, a permis non seulement de rendre visible la lutte mais aussi d’envoyer un message d’unité et de combativité.
Avec cette manifestation, « on a montré aux futurs repreneurs que nous souhaitons que la plateforme soit reprise en entièreté avec tous les salariés. […] On ne veut pas de licenciements et de familles qui souffrent. », a expliqué à Unité CGT Denis Carré, secrétaire général de la CGT Vencorex et qui a précisé : « Sans repreneur et sans investissements à Vencorex, les sites avoisinant la plateforme de Pont de Claix seront aussi en danger ».
« Salariés de la chimie, on est tous dans le même combat ! », a aussi déclaré une responsable CGT de Vencorex au cours des interventions publiques à la fin de la manifestation. « […] L’actionnaire et le patronat ont toujours le même objectif : la rentabilité à court terme, nous ce qu’on veut c’est un vrai projet industriel qui fasse durer la plateforme, qui fasse durer les activités, qui fasse durer l’ensemble des emplois de la plateforme chimique de Pont de Claix. De ça dépendra l’avenir de la plateforme de Jarrie également ainsi que l’avenir de la recherche et développement du groupe et du siège à Saint Priest. », a martelé la syndicaliste.
« La seule variable qui fait reculer le patron c’est la lutte »
Au cours de la manifestation, nous nous sommes également entretenus avec Serge Allegre, secrétaire général de la FNIC CGT. « Le message [de cette démonstration de force], c’est de faire comprendre à tous les camarades que Vencorex n’est pas seul dans la bataille. […] Ce n’est pas Vencorex et les autres. C’est tous ensemble. ».
Michelin, Bio Mérieux, Solvay, Syesqo, Arkema, KemOne, Smurfit Kappa, Lyondel Basel, Exxon… ce sont bien des centaines de salariés, non seulement de Vencorex ou d’entreprises des plateformes chimiques, mais aussi d’autres branches professionnelles (caoutchouc, plasturgie, laboratoires, pétrole…) qui se sont mobilisés.
Interrogé par Unité CGT, un responsable CGT Biomérieux nous a explicité : « notre présence ici en tant que syndicat est très simple : c’est la solidarité ouvrière. Nous faisons tous partis d’une même classe et nous devons sortir de nos entreprises. Nous devons être solidaires entre nous, les patrons savent l’être quand il s’agit de fermer les entreprises et trouver des moyens de nous exploiter encore plus. »
« La seule variable qui fait reculer le patron c’est la lutte. Il n’y a pas d’autres issues pour obtenir des emplois de qualité. […] Les patrons de Vencorex comme la totalité des patrons ont les poches pleines, ça dégueule de fric de partout. Mais ça ne leur suffit pas donc ils délocalisent pour augmenter leurs profits. », a ajouté Serge Allegre à notre micro avant de mettre en avant la nécessité impérieuse pour le pays de conserver et développer ses industries.
Selon le secrétaire général de la fédération CGT des industries chimiques, « pour améliorer l’environnement, on a des alternatives à proposer, on doit maintenir nos industries et, dans l’évolution de nos entreprises, mettre en place une politique de transition qui se fera avec les salariés qui imposeront ce qu’il faut faire au patron ».
Le dirigeant CGT a également estimé au cours de son intervention publique que cette journée de luttes, grèves et manifestation était la « première marche du combat. Ça ne fait que commencer. On peut se féliciter aujourd’hui car l’ensemble des syndicats de la chimie ont répondu présent [à l’appel de la FNIC CGT] On a des camarades qui ont traversé la France, du Nord, de l’Est pour venir vous rejoindre aujourd’hui. Les salariés de Vencorex ne sont pas tous seuls. Tout le monde est là pour soutenir [et pour rompre avec l’isolement des luttes]. Ce n’est pas le combat simplement de Vencorex mais le combat de tout le monde. […] On fera tout ce qu’il faut pour que [le groupe] revienne sur sa décision. Et le fait d’être tous présents aujourd’hui ça envoie un message à la direction. »
Après avoir rappelé au cours de son discours les aides publiques sans garanties attribuées au patronat (130 millions pour Vencorex), le secrétaire général de la FNIC CGT a tancé le discours hypocrite, incohérent et mensonger des politiques sur la « réindustrialisation » et la « souveraineté » et l’instrumentalisation de l’environnement pour justifier des fermetures et délocalisation d’usines.
Aux centaines ou milliers de licenciements directs, s’ajoutent également la destruction des emplois induits par l’activité industrielle, « Et quand on perd 5000 ou 6000 emplois, c’est le bassin d’emploi qui en prend plein la gueule et c’est pas seulement les sous-traitants ou les prestataires, c’est aussi les écoles, les hôpitaux, tout le secteur public ». Une raison supplémentaire, existentielle même, pour la population de poursuivre et amplifier son soutien aux salariés de Vencorex et des plateformes chimiques.
Rappelons-le, les groupes capitalistes, rapaces et prédateurs, assistés et biberonnés par l’aide publique, sont les seuls responsables des fermetures d’usines et d’entreprises et de la dégradation de l’environnement. La lutte des salariés pour l’emploi, avec leurs syndicats CGT, est le levier par lequel ces derniers contraindront l’Etat et ces entreprises à mettre un terme à la boucherie sociale.
Il convient de rappeler que les puissants groupes industriels présents sur les deux plateformes chimiques sont des mastodontes du secteur et ont bénéficié d’importantes subventions publiques. Si des élus locaux ont interpellé l’Etat, seule la lutte, collective et unitaire, des salariés des plateformes de Pont de Claix et de Jarrie permettra de sauver les emplois, de sauvegarder et développer l’activité industrielle sur ces deux plateformes, imposer un repreneur dans des conditions sociales optimales.