Que retenir de la Conférence européenne de la FSM ?
« Nos peuples et travailleurs à travers l’Europe partagent un désir commun d’une nouvelle société libérée de l’exploitation. » : du 28 au 30 janvier s’est tenue à Créteil, dans un esprit combatif et militant, la Conférence européenne de la Fédération Syndicale Mondiale.
1) Un événement majeur du syndicalisme de classe en Europe :
Organisée et accueillie par l’Union départementale CGT du Val-de-Marne, la Conférence européenne de la FSM a rassemblé plus de 120 délégués, dont de nombreux délégués d’organisations CGT, en provenance d’une quinzaine de pays. La Conférence s’est conclue par l’adoption d’un document d’orientation et d’un plan d’action, ainsi que par l’élection d’un nouveau secrétariat du Bureau Europe de la FSM.
Parmi les organisations étrangères présentes à la Conférence, citons notamment l’Union des syndicats de bases (USB, Italie), le Front de tous les travailleurs de Grèce (PAME), la Fédération du Travail de Chypre (PEO), le LAB basque mais aussi les syndicats de Catalogne et de Valencia, la fédération du transport de Turquie (Nakliya-Is), l’Union des syndicats serbes (SLOGA) ainsi que des délégués de la CGTP du Portugal, du syndicat danois de la construction, mais aussi des délégués allemands de VERDI, tchèques, russes, roumains, suédois, palestiniens…
La présence importante d’organisations de la CGT à cette Conférence a également été remarquée ; malgré les diffamations mensongères et continues du secteur international de la Confédération CGT, chacun peut constater que l’influence de la FSM et de ses affiliés continue de grandir et de s’enraciner partout en France (on compte plus de 120 000 CéGéTistes affiliés à la FSM, via leurs organisations professionnelles ou territoriales), dans des secteurs professionnels aussi divers que variés. En témoigne la participation de deux fédérations CGT, celles des Industries chimiques et du Commerce et des services, de plusieurs Unions départementales CGT (Val-de-Marne, Bouches-du-Rhône, Tarn-et-Garonne) ainsi que d’Unions locales CGT et de nombreux syndicats CGT du territoire (issus de nombreux secteurs comme des services publics, de la santé, des cheminots…), mais aussi des délégués de de la CGTM (Martinique) et CGTR (La Réunion) ainsi que des structures CGT venus en observatrices.
Plusieurs moments symboliques – et significatifs de l’approche internationaliste spécifique au mouvement ouvrier international organisé – ont été impulsées à l’occasion de la Conférence, notamment en solidarité avec la lutte du peuple palestinien contre le régime israélien génocidaire, suprémaciste et fasciste, et en soutien à Timothée Esprit, militant ouvrier, syndicaliste CGT et secrétaire fédéral de la FNIC CGT et licencié par la multinationale japonaise Toray au prétexte de son soutien à la lutte en Palestine.
2) « Faire un pas qualitatif » dans un contexte de crise, de guerres, de misères
Comme le souligne le document d’orientation, cette Conférence s’est tenue dans un « contexte de crise capitaliste, de l’économie de guerre, du risque de guerre généralisée, de la dégradation des conditions de vie et de travail ». « En juillet 2024, un Européen sur dix vivait sous le seuil de pauvreté dans son propre pays, tandis que le taux de chômage des jeunes dans l’UE était de 14,5 %. L’accès à l’énergie, aux transports, au logement et aux soins de santé a été rendu plus difficile par la libéralisation », a rappelé le document.
Pourtant, « dans de nombreux pays, malgré une législation antigrève drastique, des mobilisations de masse sans précédent depuis des décennies ont eu lieu » partout en Europe et font « également écho aux grandes mobilisations et grèves de 2019 et 2023 contre les réformes des retraites en France, aux grèves générales contre les lois du travail en Grèce, aux luttes des travailleurs au Royaume-Uni, en Italie, en Turquie, en Belgique, au Danemark, à Chypre, au Portugal et dans d’autres secteurs. »
« Ces luttes [toutes soutenues par les syndicats affiliés à la FSM dans tous les pays] montrent la combativité de la classe ouvrière face à l’exploitation et au durcissement des rapports de force et des conditions économiques et politiques [… au rejet des] idées d’inaction, de « paix sociale » et de « coopération sociale » cultivées par le système et ses représentants. », notamment par la Confédération européenne des Syndicats, bras armé et corrupteur de la Commission européenne et cheval de Troie du patronat dans le mouvement syndical.
La conclusion s’impose d’elle-même : « ces luttes de classe qui éclatent partout montrent la nécessité de faire un pas qualitatif en avant dans une action coordonnée avec nos affiliés de la FSM. […] Nous avons besoin de syndicats militants, actifs, vivants, de classe. Nous nous battons chaque jour pour changer le modèle de société, pour vaincre le mode de production capitaliste, pour affirmer que la guerre est toujours contre les travailleurs et les pauvres, que les richesses appartiennent à ceux qui les produisent ! »
3) « Peuples d’Europe, soulevons-nous ! » : un plan d’actions coordonnées en Europe
Une étape majeure a été franchie par la Conférence avec la décision de renforcer les activités communes et « agir ensemble sur le continent », en établissant « une première coordination de nos luttes et de nos grèves [qui ] ne peut que renforcer notre capacité à agir ensemble sur certaines questions communes »Contre les guerres, les interventions impérialistes, « l’économie de guerre » pour la solidarité internationaliste, pour l’augmentation des salaires, la retraite à 60 ans (50 pour les travaux pénibles) avec pension complète, etc…
Concomitamment, les affiliés de la FSM en Europe ont aussi affirmé la solidarité inconditionnelle avec la lutte des peuples de Palestine et de Cuba et la « priorité absolue de préparer la mobilisation de la classe ouvrière contre les guerres des impérialistes, pour la paix des peuples, par des activités, des campagnes et des actions continues. »
La FSM est en effet « opposée à toutes les guerres et condamne toutes les puissances impérialistes, quel que soit le gouvernement impérialiste qui tient les armes. Avec la guerre entre la Russie et l’OTAN en Ukraine, la guerre est revenue sur le continent européen pour la deuxième fois depuis le bombardement de la Yougoslavie par l’OTAN en 1999. Nous condamnons les guerres et les interventions impérialistes qui engendrent pauvreté, réfugiés et misère. Nous disons NON aux budgets de guerre des gouvernements de tous les pays. Nous exigeons des augmentations de salaires, pas d’argent pour les guerres impérialistes. Désengageons nos pays des guerres ! »
En opposition totale et frontale avec la CES, le jalon posé est on ne peut plus clair et significatif, « les syndicats internationaux de la FSM, en coopération avec l’EUROF, peuvent être le bras qui rapproche les politiques, les actions et les positions de la FSM des travailleurs. ».
4) Ouvrir une perspective pour la classe ouvrière en Europe
La Conférence européenne de la FSM a permis de confirmer les analyses et perspectives qui se dessinent dans notre période troublée. En réalité, cet événement constitue une marche supplémentaire dans le renforcement et la reconquête du syndicalisme de classe, de masse, unitaire, démocratique et internationaliste, 34 ans après la contre-révolution en URSS et dans les anciens pays socialistes.
Depuis une vingtaine d’année, chacun a pu constater la marche en avant vigoureuse de la Fédération Syndicale Mondiale, notamment sous l’impulsion décisive de son ancien secrétaire général, Georges Mavrikos. Les syndicalistes de classe poursuivent ainsi méthodiquement ce travail militant et quotidien. La vague d’affiliation de syndicats, UD, fédérations de la CGT, ainsi que l’intérêt manifesté par des dizaines de milliers de syndicalistes CGT, à la FSM en sont de vibrantes illustrations.
Cette initiative est d’autant plus nécessaire que, « 110 ans après la première guerre mondiale », les peuples d’Europe se retrouvent de nouveau à la croisée des chemins, alors que les généralisations des guerres, fruits d’un système capitaliste en crise permanente, fait craindre une nouvelle explosion générale en Europe et dans le monde.
Dans ce contexte, il est indéniable que nous avons besoin, en Europe, centre majeur de l’économie mondiale et continent très industrialisé, du regroupement des forces engagées dans la lutte des classes. La CES est décrédibilisée tant par son inaction, incapacité (et non-volonté) de défendre les intérêts des travailleurs (inflations, restrictions du droits de grève, précarité, chômage, austérité, guerres) que par l’onde de choc provoquée par l’affaire retentissante du Qatar Gate, vaste système de corruption qui l’a éclaboussé au plus haut niveau avec l’arrestation de son secrétaire général. Mais, cette organisation jaune, au service exclusif de l’Union européenne (dont elle est co-rédactrice des traités libéraux) et des grands groupes capitalistes, continue d’imposer – grâce à ses moyens financiers et ses mécanismes autoritaires – son influence délétère en Europe et d’entraver la combativité des organisations syndicales et des travailleurs.
La Conférence européenne de la FSM, deuxième événement récent et majeur de la FSM en France après le congrès mondial du Comité des Jeunes travailleurs et travailleuses de la FSM à Port-de-Bouc, dans les Bouches-du-Rhône en novembre 2024, permet ainsi, en Europe mais aussi dans notre propre pays, grande puissance impérialiste, de tracer une nouvelle fois la ligne de démarcation qui nous sépare de la Confédération européenne des Syndicats, de ses dirigeants qui enferment la lutte des travailleurs dans le cadre réformiste et inefficace du « dialogue social », du « partenariat » européen, du mensonge du « capitalisme à visage humain » et de l’Europe « sociale ».
Plus encore, la volonté de renforcer les capacités de coordination et de communication du Bureau Europe de la FSM, d’encourager le développement de la formation syndicale, notamment avec l’Institut Ouvrier International, et les perspectives d’actions renforcent notre confiance dans la force de la classe ouvrière, en France, en Europe et dans le monde. Plus que jamais nous demeurons sur la voie du renversement de la barbarie capitaliste, de l’abolition de l’exploitation de l’homme par l’homme !