Alors que se prépare la mise à l’arrêt du pays le 7 mars et que de nombreuses fédérations de la CGT appellent à un durcissement de la grève pour faire plier le gouvernement, nous vous proposons un retour sur les principaux arguments déployés par le gouvernement.
- « La réforme est urgente et indispensable »
Le gouvernement met avant l’argument démographique pour justifier sa réforme : si en 1970, trois actifs cotisaient pour un retraité, ce ratio tombe à 1,7 aujourd’hui et pourrait baisser encore à 1,4 en 2050. Or, le rapport du COR lui-même met en avant la responsabilité première des politiques menées par les gouvernements ces dernières années pour expliquer le déficit : exonération de cotisations sociales des entreprises, casse des services publics et stagnation de la rémunération des fonctionnaires.
De plus, rappelons que la productivité des travailleurs et travailleuses en France compense très largement la baisse du nombre de cotisants par rapport au nombre de retraité. Ainsi le déficit des retraites n’est pas lié à un problème de dépense mais de recette : il faut chercher l’argent où il se trouve : dans les caisses du patronat.
Enfin, la question du financement des retraites, avant d’être une question technique, est un sujet politique qui traduit un certain choix de société.
- « Améliorer les petites retraites »
Déjà prévu par une loi promulguée en 2003 mais jamais mise en application, la retraite minimale à hauteur de 85 % du SMIC est bien moins généreuse que ce que laisse entendre le gouvernement. En effet pour toucher ces 1200€ il faudra avoir travaillé toute sa vie au SMIC tout en ayant validé l’intégralité de ses trimestres. Dans les faits ces conditions sont tellement restrictives qu’elles ne concerneront qu’une infime minorité de travailleuses et de travailleurs.
Le gouvernement a d’ailleurs été démasqué, et humilié, par la révélation du caractère mensonger des effets d’annonce autour de ces fameux « 1200 euros ».
- « Les femmes seront les premières bénéficiaires »
Les travailleuses sont payées en moyenne 28 % de moins que les travailleurs, mécaniquement leurs salaires plus bas entraînent des retraites plus basses, de plus 40 % des travailleuses ont des carrières hachées et/ou subissent des temps partiels, par conséquent elles n’arrivent pas à obtenir l’ensemble des trimestres nécessaires. La revalorisation de la retraite minimale ne s’appliquera donc pas aux travailleuses les plus précaires. De même, la prise en compte des trimestres en congés parental pour le calcul des droits à la retraite ne s’applique qu’à celles qui ont eu une carrière longue. Ainsi les inégalités femmes/hommes s’accroissent : en moyenne les travailleuses devront travailler sept trimestre en plus contre cinq pour les travailleurs.
- « Ceux qui sont les plus exposés à la pénibilité, qui ont commencé tôt, ce sont justement ceux-là que nous voulons protéger »
L’Exécutif prétend vouloir protéger celles et ceux qui sont confrontés aux métiers pénibles. Or c’est Emmanuel Macron qui a supprimé en 2018 quatre des dix critères permettant d’évaluer la pénibilité d’un travail : manutention manuelle de charges, postures pénibles, vibrations mécaniques et exposition aux risques chimiques. Pour bénéficier d’un départ anticipé à la retraite, en raison de la pénibilité de leur métier, le gouvernement entend généraliser une visite médicale pour les salariés afin de faire reconnaître par un médecin leur maladie professionnelle et un taux d’incapacité permanente dépassant les 10%. Il s’agit bien de casser les garanties collectives au profit de mesures individuelles plus compliquées à faire valoir. De plus, en prétendant mieux prendre en compte les carrières longues ou très longues, le gouvernement souhaite en réalité réaliser des économies sur celles et ceux qui ont commencé à travailleur le plus tôt, puisque la réforme n’impactera que très peu celles et ceux qui ont commencé à travailler à partir de 21 ans.
- « On est le pays européen où les gens partent le plus tôt »
Le gouvernement se plaît à comparer le système des retraites français à celui des autres pays européens pour en démontrer la soi-disant générosité. Rappelons d’abord que ces comparaisons sont discutables en raison de la complexité de ces systèmes. Du fait de cette complexité, l’OCDE utilise l’âge effectif de départ à la retraite et non l’âge légal. Or, l’âge effectif du départ à la retraite en France se situe dans la moyenne des pays européens c’est-à-dire 64 ans. Enfin, si l’on doit comparer l’âge effectif de départ à la retraite entre européens comparons également les conditions de ce départ. L’espérance de vie en bonne santé en France est de 63,7 ans selon Eurostat contre 73,8 ans en Suède ou 69,4 en Espagne.