Tout brûle déjà. Chacun le voit et le sent ; le capitalisme en crise étrangle et détruit nos vies. Toutes les vies ? Non.
Avec 568 milliards de dollars de dividendes distribués au deuxième trimestre 2023 à l’échelle de la planète, en hausse de 5 %, l’année 2023 s’annonce exceptionnelle pour les capitalistes, après une année 2022 « historique ». Pour les actionnaires des groupes français, la hausse est plus importante encore : 13,3 %. La profitabilité des entreprises françaises a aussi bondi au deuxième trimestre de cette année tandis que le taux de marge des sociétés non financières a augmenté de 1,5 point, pour atteindre 33,2 %.
En clair, ces entreprises ont spéculé sur l’inflation : ce sont des profiteurs de guerre (économique et donc sociale). Un exemple particulièrement éclairant : la marge brute de l’industrie agroalimentaire a atteint 48,5% au deuxième trimestre 2023.
Dans le même temps et consécutivement, selon le cabinet patronal Circana, en deux ans, les prix ont grimpé de 21,3% en France pour les produits de consommation courante. Près d’un étudiant sur deux (46 %) a déjà sauté un repas à cause de l’inflation, alerte une étude de Cop1 et l’Ifop.
Ajoutons qu’un rapport de l’INSEE de juillet dernier a fait état de neuf millions de personnes en situation de privation matérielle et sociale dans le pays, un niveau sans précédent. Ce taux de privation mesure le renoncement des ménages à certains produits ou services, comme se chauffer correctement, posséder deux paires de chaussures, manger de la viande ou du poisson tous les deux jours, ou partir une semaine en vacances chaque année.
Face à ce contexte, « la dynamique salariale a, à peu près, suivi l’inflation », a menti Emmanuel Macron au cours de son entretien télévisé du 24 septembre. L’indexation des salaires sur l’inflation, le blocage des prix ? Le président des riches a – logiquement – balayé ces revendications légitimes et nécessaires face à la vie chère. L’ancien banquier promet « un accord sur la modération des marges » des entreprises. Une solution irréaliste qui n’est rien d’autre qu’un effet de manche inutile, à l’image du fiasco gouvernemental au sujet de la vente à perte des carburants, une possibilité rejetée par l’ensemble des distributeurs.
Inciter les grands groupes à mettre la main à la poche ? « Je vais y veiller personnellement », a osé le président, ajoutant, « Vous avez des grands groupes qui vous ont mis une belle augmentation sur le dentifrice et se la mettent dans la poche. » Emmanuel Macron et ses ministres, notamment Bruno Le Maire, ont déjà par le passé manier ce discours ridicule et qui n’a surtout rien de contraignant.
Pourtant, aux grands maux les grands remèdes, face à l’inflation et la spéculation – inévitables sous le capitalisme – le « maximum des prix », la punition des spéculateurs/affameurs, le rétablissement de l’échelle mobile des salaires indexée sur les prix, la création de monopoles publics (énergie, transport, logement, santé, etc…) sont indispensables.
L’écrivain Romain Gary a écrit : « La vérité, c’est qu’il y a une quantité incroyable de gouttes qui ne font pas déborder le vase ». Nous en sommes, malheureusement, toujours face au même constat. Malgré l’opposition frontale et déterminée de l’ensemble du pays, Macron et sa clique ont imposé la réforme des retraites, la fin des régimes pionniers, l’allongement du départ légal à la retraite à 64 ans. Depuis 2 ans, l’inflation ronge nos vies et engraisse encore davantage les patrons.
En vérité, « tout brûle déjà ». Et ce pouvoir est sans aucun doute, et malgré ses violences d’Etat, beaucoup plus faible qu’il n’y parait ; le président copieusement sifflé par « l’Ovalie » lors du match d’ouverture de la Coupe du monde de rugby en France a rappelé à tous et toutes le niveau de détestation du régime.
Mais, pour mettre à terre Macron, ses amis, ses commanditaires, son bras armé prétorien, des sifflements ne suffiront pas. Ni une stratégie de journée saute montons. Ni une révolte aveugle et sans perspectives.
N’oublions pas les milliers d’incarcérations arbitraires qui ont suivi les soulèvements urbains de cet été. Sans oublier les Gilets jaunes éborgnés, mutilés et incarcérés, et le millier de syndicaliste CGT poursuivis par les tribunaux. Tout est lié. Plus le capitalisme s’enfonce dans sa propre crise systémique, plus la répression ne pourra que s’accentuer pour interdire aux travailleurs de relever la tête.
Pour gagner, pour incendier définitivement ce régime, car « tout brûle déjà », un autre chemin est nécessaire. Cette voie, c’est celle de l’organisation de la colère et de la réappropriation de nos destins. Avec des perspectives claires et une stratégie lucide, par la grève, enracinée dans les entreprises et coordonnée par une Confédération CGT à la hauteur des enjeux.
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