A deux jours du début de la grande grève générale contre la réforme des retraites, nous commençons la publication de témoignages militants intitulés « Paroles de grévistes ». Dans le cadre de cette rubrique, nous recueillons les paroles de ces travailleurs militants de la CGT qui construisent et animeront la grève générale avec courage et détermination.
Contacté par téléphone, une travailleuse de 24 ans, cheminote en région parisienne et syndicaliste à la CGT, nous a expliqué la situation dans son secteur d’activité, les perspectives de mobilisation contre la réforme des retraites et ce qu’elle attendait de la grève générale à partir du 5 décembre.
« Après le mouvement des cheminots en 2018, on a vu des salariés qui étaient abattu révoltés, fâchés, dégoutés et qui auraient voulu continuer la lutte. Malheureusement le rapport de force n’était pas assez violent. Mais récemment, le droit de retrait a remobilisé. Oui, il y a possibilité de faire des choses, oui, les salariés sont prêts à dire « stop » et à cesser le travail.
Je suis outrée par les mensonges des médias, notamment sur les cheminots. Aujourd’hui, tout le monde se sent concerné. Personne ne peut accepter ou tolérer une casse sociale aussi importante. Avec le syndicat on essaie de convaincre tout le monde, que ça soit les conducteurs de train, les commerciaux, tous les salariés, pour leur faire comprendre que tout le monde a son rôle à jouer dans la grève. Chaque salarié est utile et plus on sera nombreux le mieux ce sera pour tout le monde.
Au-delà de la journée du 5 décembre, c’est la suite qui est très importante. Les passages en force du gouvernement, les pertes de salaires font que certains salariés ont du mal à se projeter. Certains ont des enfants, des crédits….
Dans le même temps, au niveau des salariés, notamment les jeunes en dessous de la trentaine, beaucoup sont déjà prêts à se projeter dans plusieurs jours de grèves. Soyons lucides, les salariés ont besoin de voir comment ça se passe. On a vraiment à cœur de faire en sorte que les salariés participent aux Assemblées générales pour pouvoir voter et décider et qu’on ait l’avis de tout le monde. A nous de faire en sorte qu’ils se mobilisent et participent à la vie de la mobilisation.
En tout cas, on part en grève au minimum jusqu’au 10 décembre inclus. Mais il va falloir animer la mobilisation, faire des actions, construire la caisse de grève, inviter tout le monde à rejoindre le mouvement. D’ailleurs, des actions auront lieu jusqu’au 9 et 10 dans un premier temps.
Je sens un ras-le-bol général, pas que chez les cheminots, on le sent partout. On n’avait jamais vu les pompiers se mettre en grève à ce point-là. Les hospitaliers, la santé, etc… ceux qui nous dirigent ont tellement tiré sur la corde pendant si longtemps que là c’est à deux doigts de casser et que les gens n’en peuvent plus. Par exemple, sur ma zone, les jeunes salariés sont déterminés parce qu’ils se sont rendus compte que si on laisse le gouvernement faire ce qu’il veut, on n’aura pas de retraites.
Le rapport de force on le créera surtout en bloquant le pays, en bloquant l’économie. On a que ce levier-là qui peut nous permettre d’espérer un recul du gouvernement. En réalité, le mouvement social peut aller tellement loin qu’on peut même imaginer les faire reculer ET gagner sur d’autres revendications.
Sur notre secteur, par exemple, on ne perd pas de vue l’aspect métier et les problèmes locaux. Dans nos tournées on mobilise sur les retraites, mais aussi sur nos revendications locales. On montre aux salariés qu’il faut prendre en compte aussi les problèmes du quotidien.
On est fier que nos parents et grands-parents se soient battus pour des conquis sociaux, il est hors de question que j’ai honte vis-à-vis de mes futurs enfants ou petits-enfants. Ça suffit, patronat et gouvernement ne peuvent pas claquer des doigts et nous écraser sans arrêt. On voit d’ailleurs qu’il y a des contestations sociales partout à l’international, ce que j’espère c’est qu’on puisse se mobiliser comme au Chili. »
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