L’Union syndicale de base a lancé un appel à la grève générale pour le mercredi 25 mars. Alors que l’Italie compte ses morts, les syndicats et la classe ouvrière du pays n’entendent pas laisser un pouce de terrain face au patronat. Nous avons interrogé Pierpaolo Leonardi, dirigeant de l’Union syndicale de base (USB) , syndicat de classe en Italie et affilié à la Fédération Syndicale Mondiale (FSM).
Entretien avec Pierpaolo Leonardi, dirigeant de l’Union syndicale de base (USB)
Pouvez-vous décrire brièvement vos responsabilités au sein de l’Union syndicale de base (USB) ?
Je suis l’un des fondateurs de l’USB et je suis membre de l’Exécutif national confédéral. Jusqu’en novembre 2019, j’étais secrétaire général de l’union internationale des services publics de la Fédération syndicale mondiale.
Quelles sont les responsabilités des capitalistes dans cette crise économique et sanitaire ?
Les responsabilités des capitalistes sont énormes. Au cours des 30 dernières années, ils ont essayé de revenir sur les conquis des travailleurs après la Seconde guerre mondiale en termes de droits à la santé, des pensions, de l’éducation, des biens collectifs. Les capitalistes ont identifié les énormes profits qu’ils pouvaient retirer de la privatisation de l’État providence et ont décidé que c’était la bonne occasion pour relancer leur modèle de société. Ils ont donc obtenu des différents gouvernements, tant centristes que du centre-gauche, le feu vert pour s’enrichir par la privatisation et le soutien aux entrepreneurs privés dans les domaines de la santé, du bien-être, de l’éducation.
Dans ces conditions de « confinement », comment arrivez-vous à protéger les travailleurs ?
Évidemment, ce n’est pas très simple, nous sommes habitués au contact direct avec les travailleurs, nous sommes un syndicat de combat, qui préfère la mobilisation et la lutte comme forme d’organisation permanente.
Aujourd’hui, nous passons de nombreuses heures en vidéoconférence avec le réseau national de nos délégués pour analyser et discuter de cette situation exceptionnelle qui produira à l’avenir des changements véritablement marquants. À leur tour, les délégués des entreprises ou des services contactent les syndiqués et tous les travailleurs pour s’instruire de leurs besoins et les protéger dans leurs droits, même par le biais de plaintes au lieu de piquets de grève.
Dans les entreprises qui fonctionnent encore et dans les services essentiels, nous organisons des manifestations pour attirer davantage l’attention sur la santé, exiger la distribution de tous les dispositifs de protection et arrêter le travail lorsque ces derniers ne sont pas garantis.
Pourquoi l’USB appelle-t-elle à une grève générale le 25 mars ?
Le virus se propage de manière très violente uniquement dans le nord de l’Italie, où la concentration des entrepôts industriels et logistiques est la plus élevée, ce qui signifie que les travailleurs des usines du nord sont parmi les plus exposés au virus. Nous demandons la fermeture de toute production non strictement nécessaire et indispensable à la lutte contre le virus, ainsi que des services non essentiels, nous demandons une garantie de salaire pour tous les travailleurs et un revenu de citoyenneté pour les chômeurs et les travailleurs précaires et pour ceux qui ont dû fermer leurs commerces. Surtout, nous demandons que chaque travailleur ait le droit à la santé
Comment la classe ouvrière et les syndicats en France peuvent-ils s’inspirer de vos luttes et de l’expérience acquise ces dernières semaines en Italie ?
Ces dernières années, les travailleurs français ont été à l’avant-garde des luttes pour la défense de leurs droits, de la retraite au salaire et je ne pense pas qu’on puisse leur apprendre quoi que ce soit. Cependant, dans cette période, nous pensons qu’il est nécessaire d’être très proche des travailleurs, parce que ces derniers ont peur, ne savent pas ce que cette épidémie va provoquer et qu’au jour d’après, rien ne sera plus comme avant.
Un espace politique important s’est ouvert pour que nos positions politiques de rejet du capitalisme puissent s’affirmer auprès d’une grande partie des travailleurs. Je crois que c’est notre tâche principale aujourd’hui.