Nous donnons la parole ci-dessous à deux camarades de la CGT Sanofi
Interview de Jean-Louis Peyren, Coordinateur CGT Sanofi
Les travailleurs de Sanofi sont en grève pour les salaires et l’emploi stable, peux-tu nous expliquer les raisons de cette grève massive et reconductible ? Quelles sont les revendications de la CGT en matière de salaire ?
Les salariés sont en grève sur des revendications que porte la CGT. La première revendication, c’est 10% d’augmentation de salaires, un rattrapage de 5% (d’augmentation collective) pour l’année 2022, 10 000 euros de prime pour le partage de la valeur et l’embauche des 2 tiers des précaires, sachant que dans Sanofi, il y a 3700 précaires dont 1700 en contrats d’apprentissage.
[Pour expliquer la force du mouvement, il faut comprendre qu’] il y a un vrai mécontentement des salariés. Il faut savoir que ça fait déjà un peu plus d’un an que nous travaillons sur ces négociations annuelles obligatoires 2023. Les syndicats CGT et la Coordination CGT Sanofi ont organisé « un tour de France CGT Sanofi » dans toutes les usines depuis un an et demi.
Avec les camarades sur tous les sites, on a organisé des réunions avec les salariés : ça a créé des échanges parce qu’on faisait aussi venir des syndicalistes d’autres sites de Sanofi pour participer aux réunions. Il y a eu un vrai partage d’expérience et de vécu sur le lieu de travail entre salariés. Ca a notamment permis de mettre en avant qu’on avait tous les mêmes problématiques et de là, on a eu la volonté d’essayer de faire quelque chose et on a continué notre tour de France d’information à Sanofi pour en arriver au résultat d’aujourd’hui : plus de 14 sites en grève depuis le 14 novembre, entre 2500 et 4000 salariés en grève journalièrement.
On se retrouve aussi dans une situation où la presse doit être sans doute muselée parce qu’on n’entend pas parler de la grève dans les médias, pourtant il y a tous les ingrédients : le nombre, 2500 à 4000 grévistes, le bruit avec des blocages sur certains sites, les larmes à cause des gaz lacrymogènes qui nous sont balancés par les forces de l’ordre, le sang à cause des coups de matraques, toujours par les forces de l’ordre.
Malgré cette indifférence médiatique complète, on est motivés et on continuera à se battre.
Sanofi est-t-il un spécialiste de l’emploi précaire ? Que propose la CGT ?
Sanofi use et abuse de l’emploi précaire. La revendication de la CGT sur l’embauche des deux tiers des précaires correspond au nombre de postes occupés sur plus de 18 mois par des précaires. On part du principe que l’occupation d’un poste par un précaire doit être par nature et vis-à-vis du Code du Travail quelque chose qui ne doit pas être inscrit dans le temps ; plus de 18 mois on considère que c’est un poste pérenne et que Sanofi ne respecte pas le Code du Travail.
Des élections professionnelles ont lieu en ce moment, quels sont les résultats pour la CGT ?
Des élections ont eu lieu au niveau de la société Sanofi Vaccin (anciennement Sanofi Pasteur). Sur tous les sites, la CGT est en progression. Sur certains sites, la CGT a doublé le nombre de sièges. Par exemple, sur le site de Val de Reuil on a progressé de 9 points de représentativité : la preuve est faire que quand la CGT fait de la CGT, quand la CGT est rouge elle est toujours plus forte que quand elle veut faire de la CFDT.
Comment la multinationale française répond-t-elle au mouvement de grève ?
Sanofi répond par le mépris, ce qui amplifie la colère, voire la haine des salariés. L’organisation syndicale CGT sait canaliser la colère et sera toujours avec les salariés pour les défendre, mais la direction se débrouillera avec la haine qu’elle est entrain de susciter chez les salariés.
Très clairement, la réponse c’était des gazages, des coups de matraques, des blocus débloqués par la gendarmerie avant d’être repris ; on entame un bras de fer. De toute façon c’est par la lutte et le rapport de force qu’on gagnera. Il n’y a jamais eu de conquêtes sociales par la négociation, ça a toujours été par le rapport de force. On se bat et on va se battre.
Morad Zerrouali, opérateur de zone, Délégué Syndical Central CGT à Sanofi
« La grève est effectivement inédite dans le sens où nous, les coordinateurs CGT Sanofi, on a ont œuvre pour une convergence des luttes en même temps plus de 14 sites en luttes simultanément donc oui c’est historique même.
Depuis le début, nous sommes une équipe de 5 élus qui découvrent la lutte des classes et nous nous organisons comme une petite armée malgré notre intersyndicale virtuelle (à part la Cfdt avec qui nous avons œuvré et cohabité au début) les salariés ont été surpris de notre réactivité, de notre communication assez explicite et surtout de notre engagement sans faille et de notre présence nuit et jour.
Actuellement, Sanofi use et abuse de toutes les formes de moyen de pression que ce soit au niveau médiatique ou juridique, une preuve en a été donné mercredi dernière après un mouvement de salariés sur le site de Gentilly. La direction du groupe a fait en sorte de mobiliser des CRS pour canaliser et réprimer les salariés mécontents avec du gaz et des coups de matraque.
Nous avons contacté des médias par des communiqués de presse pour les faire intervenir et couvrir l’événement historique mais en vain. »
Le délégué syndical souligne par ailleurs l’importance et de l’organisation CGT, avec les syndicats, les coordinateurs CGT, la FNIC CGT, et de l’engagement militant de tous et toutes dans cette bataille pour arracher à la multinationale Sanofi ce qu’elle doit à ceux et celles qui créent la richesse du groupe. Les travailleurs sont massivement en grève à Sanofi depuis le 14 novembre ; pas moins de 15 sites sont concernés.