ZOOM SUR LES LUTTES DANS LE VAL-DE-MARNE

A l’initiative de l’Union départementale CGT 94, une conférence de presse a été organisée le 1er décembre afin d’appuyer la visibilisation des luttes des travailleurs dans le Val-de-Marne. Ce tour des luttes dans le département a eu lieu dans la foulée d’un rassemblement organisé devant l’Inspection du Travail à Créteil en solidarité avec les luttes et contre la répression judiciaire.

Plusieurs secteurs et entreprises étaient présents pendant la conférence de presse. Les syndicalistes CGT ont dressé un tableau représentatif des luttes et grèves. Ces luttes, racontées par ceux et celles qui les vivent permet d’apporter un éclairage sur la combativité de la classe ouvrière qui se manifeste tous les jours, dans tous les secteurs, dans tout le pays.

Premier constat exprimé : « malgré les coups de force du gouvernement avec ces six 49-3 (budget de l’état et sécu), sur commande du Medef et de Bruxelles, il n’y a ni fatalité ni résignation. » Les syndicalistes CGT du Val de Marne ont ainsi rappelé qu’Emmanuel Macron n’a ni majorité absolue ni adhésion populaire pour appliquer ses projets de régression sociale.  Pour la CGT 94, il s’agit là d’un des facteurs qui expliquent la profondeur de la contestation sociale, à mettre aussi en lien avec la colère des salariés face à l’explosion des profits et les centaines de milliards d’aides publiques données sans contreparties : partout se fait jour la revendication d’une véritable répartition des richesses.

>>> Parmi ces « paroles de grévistes » exprimées pendant la conférence de la presse, on trouve notamment la lutte menée par les gaziers grévistes à GRDF pour les salaires, avec le blocage et la réappropriation de l’outil de travail sur certains sites, notamment à Alfortville ou Villeneuve-le-Roi.

Autre exemple expliqué à la presse : à Carrefour Bercy, la CGT est assignée en justice par le patron et fait face à la répression pour avoir organisé la lutte pour les salaires et contre la location-gérance (découpage et vente à la pièce des magasins et des salariés). Le syndicaliste CGT a notamment rappelé la volonté du groupe d’imposer la polyvalence à outrance, dont les salariés ne veulent pas. Ces derniers, entre « incompréhension et colère », sont appelés à lutter pour leurs salaires et pour la conquête de la dignité.

>>> Des travailleurs de la RATP, également présents, ont eux aussi explicité la situation sociale dans la régie des transports parisiens. Les ouvriers du Matériel-Roulant-Ferroviaire (MRF) sont ainsi particulièrement mobilisés, notamment sur l’énorme atelier de Sucy en Brie. La stratégie de grève mise en place par la CGT « pose beaucoup de problèmes à la direction », disloque l’organisation interne de la RATP, et paralyse le bon fonctionnement de la maintenance, à tel point que la direction n’a pas hésité à recourir/obligé des cadres à travailler sur la maintenance.

Comme l’a rappelé le syndicaliste CGT, cette tentative de briser la grève est non seulement scandaleuse mais aussi très dangereuse. En effet, les cadres envoyés remplacer les grévistes ne sont ni formés ni habilités à ce travail : en clair, la RATP préfère prendre des risques avec la sécurité des trains (et donc avec la vie des traminots et des millions d’usagers quotidiens de la RATP en Ile de France. Par conséquent, un DGI (Danger Grave Imminent) a été posé par les travailleurs mobilisés de la RATP, mais aussi de la part des conducteurs de RER (dont la responsabilité en cas d’accident peut être engagée).

Le syndicat CGT est vent debout contre une direction qui cherche à diviser les ouvriers et traminots en attaquant les primes statutaires et en proposant la « clause du grand père » (qui vise à n’appliquer la réforme des retraites qu’aux personnes rentrant sur le marché du travail). Sur ces derniers points, la CGT refuse net et rappelle « à travail égal salaire égal », et confirme son attachement viscéral à la défense du régime spécial de retraites à la RATP.

De manière plus générale, les syndicalistes CGT de la RATP dans le 94 ont rappelé les revendications d’augmentation salariale de 300 euros, relevant non seulement qu’il n’y a pas eu de revalorisations salariales depuis 10 ans à la RATP, mais aussi que les plus bas salaires à la régie se trouvent justement dans le MRF.

Un syndicaliste CGT de la RATP Bus a également élargi l’analyse au niveau national, pointant du doigt la question des salaires qui se pose à tous et toutes en France. Il a rappelé que le secteur du transport en commun parisien était en souffrance, mentionnant entre autres les problèmes de recrutement. La section Bus de la RATP fait ainsi l’objet d’un certain nombre de restructurations, sans contreparties en termes de temps/conditions de travail. Le syndicaliste CGT a aussi martelé l’opposition totale à la privatisation rampante de la RATP, prévue pour 2025, et la volonté de la CGT de maintenir un service public de qualité, indissociable de bonnes conditions de travail et de salaires à la hauteur. Il a également affirmé la nécessité de la généralisation des mouvements de grèves.

>>> Des travailleurs et syndicalistes CGT de la multinationale Rentekil, leader du service d’hygiène, sont revenus sur la grève totale qu’ils mènent depuis le 8 novembre dans la filiale IGS (Initial General Service) et ont dévoilé les méthodes semi-mafieuses de leur direction qui n’hésite pas à placer des outils de traçages sur les camions utilisés par les salariés. Le mouvement de grève a eu pour effet d’imposer des négociations salariales anticipées.

>>> De même, des syndicalistes CGT de la société Pizzorno, ont fait état de leur victoire face à une direction qui a été contrainte de revenir sur sa décision de supprimer des bennes à ordure, ce qui impactait considérablement les conditions de travail, déjà pénibles, des éboueurs de Pizzorno. Ces travailleurs ont tenu à non seulement rappeler l’importance de l’interpro dans le soutien aux luttes, mais aussi à dénoncer la collusion/complicité de la CFDT avec la direction.

>>> Un syndicaliste CGT de Qualipel (centres d’appel de Free) à Vitry-sur-Seine a également rapporté la situation dramatique vécue par les travailleurs face à une direction qui veut imposer, de manière autoritaire et brutale, la fusion-réorganisation de ses activités, tout en interdisant aux salariés les ruptures conventionnelles. Nombre de ces derniers ne se voient pas partir d’une ville où ils se sont installés avec leurs familles et vivent cette situation comme une véritable « prise en otage ». La conséquence de ce management brutale est ici le même qu’ailleurs : des salariés en souffrance et en dépression, l’explosion des cas de risques psycho-sociaux. La CGT exige 8% d’augmentation salariale et un plan de départs volontaires.

>>> Un éclairage a également été effectué par une syndicaliste CGT sur la situation dans l’éducation nationale, rappelant l’exigence de la revalorisation salariale, les difficultés (organisés par le ministère) de recrutements, de la lutte contre des conditions de travail de plus en plus dures. La réforme du lycée pro a également été mentionnée, la syndicaliste relevant une « stratégie du choc » employée par le gouvernement pour imposer rapidement la sape de l’enseignement général et l’exploitation d’enfants sous couvert « d’apprentissage »

>>> Enfin, une syndicaliste CGT de Sanofi a fait état de la grève massive et inédite dans la multinationale pharmaceutique. Cette travailleuse, salariée de Sanofi à l’usine de Vitry-sur-Seine, a fait le récit d’un ras-le-bol général des salariés dans le groupe face aux faibles salaires et l’explosion du cout de la vie, face aux cadences infernales et la précarité. Cette exaspération se double également d’une colère largement partagée face aux provocations de la direction, la répression d’Etat, le blocus médiatique.

La syndicaliste a également rappelé les revendications portées par la CGT : rattrapage salarial pour 2022, une augmentation salariale de 10% pour l’année 2023, l’embauche des précaires du groupe.

>>> Dans sa synthèse, Cédric Quintin, secrétaire général de l’Union départementale CGT du Val-de-Marne, a relevé un climat de tension sociale très forte, et dans le département et dans le pays. Il a rappelé l’importance de la CGT pour tous les salariés, y compris bien sûr pour tous ceux et celles qui ne sont pas encore rentrés en lutte.

Pour le secrétaire général de l’UD CGT 94, la période est à la mobilisation et à l’organisation des luttes, dans un contexte où le CAC 40 voit ses bénéfices exploser tandis que la classe dominante essaie à tout prix de continuer sa politique de régression sociale permanente ; « il ne suffit pas d’être en colère ou indigné, il faut s’organiser et rentrer dans la bataille », d’autant plus que la réforme des retraites, avec celle de l’Assurance-chômage, sont sur la table, après un vote de l’Assemblée nationale actant la mise à mort de la Sécurité sociale.

Face à une « offensive destructrice du gouvernement » et « la surdité patronale qui pousse à la radicalité de luttes », l’heure est donc bien à la mobilisation générale, notamment sur trois sujets : « le pouvoir d’achat, l’emploi et les conditions de travail ». Des revendications immédiates, à relier selon le dirigeant, au projet de société CGT.

Enfin, il a fait le lien avec le 53e congrès CGT, rappelant l’importance fondamentale de ce moment pour l’ensemble des syndicats du pays, et souligné que le syndicalisme de luttes ne pouvait être compatible avec un syndicalisme d’apaisement intégré dans la défense du système capitaliste.

Pour l’UD CGT 94, il est « important de soutenir et renforcer ceux qui sont actuellement en lutte, de conquérir un vote CGT puissant lors des scrutins professionnels, de s’inscrire dans les prochaines dates d’actions à l’image du 3 décembre contre le chômage et la précarité, du 6 décembre pour les retraites, du 7 décembre dans le commerce et chez les cheminots pour les salaires. » Dans ce contexte, l’UD CGT 94 prépare également ses propres actions sur son territoire, dont une action qui devrait particulièrement résonner dans le Val-de-Marne et « sonner l’heure de la généralisation de la riposte. »

D’autant que la période a été marquée, est marquée et sera impactée par le Covid, les guerres, les récessions, la multiplication des injustices. Pour la CGT 94, c’est bien le capitalisme qui est en cause et qui nous envoie à l’abattoir. « Pour le renverser ou lui tordre le cou, il est vital de continuer d’élever le rapport de force pour imposer le smic à 2000 euros, les 32h, le retour de la retraite à 60 ans, d’investir dans les services publics et de les sortir de la loi du marché, de réindustrialiser notre pays, etc. » affirme ainsi l’UD CGT du Val-de-Marne qui rappelle une nouvelle fois l’importance d’articuler le local avec le global : une condition fondamentale pour amplifier les luttes en cours.