VERTBAUDET : RECIT-TEMOIGNAGE SUR LA RÉPRESSION POLICIÈRE

Nous remercions vivement le camarade et syndicaliste CGT qui nous a transmis son témoignage de garde à vue et son récit de la répression policière à Vertbaudet. La tentative de briser la grève est édifiante et illustre la réalité vécue par ceux et celles qui refusent de courber l’échine. Tous et toutes ensemble aux côtés des grévistes !

Vertbaudet et Garde-à-vue : témoignage

En réunion à l’UD CGT des syndicats du Nord, j’ai été appelé par un soutien aux grévistes vers 11H30 du fait d’une intervention policière sur le site de VERTBAUDET (14 avenue Marquette-Lez-Lille).

Arrivé à midi, j’ai pu constater la présence de plusieurs véhicules de police et d’une quinzaine d’agents qui ne portaient pas tous leur matricule de façon visible. Photos et vidéos faites sur demande de notre avocat, je me rends, toujours en qualité d’observateur, au niveau du portail arrière de l’entrepôt logistique.

Je constate alors l’absence des soutiens habituellement présents, à la suite de l’intervention policière, désormais tous retranchés sous les tonnelles situées au niveau de l’autre entrée.

Soucieux de comprendre les raisons de la présence d’autant d’unités de police, tout en étant au téléphone avec notre avocat, je demande à ces derniers les raisons juridiques de celle-ci : « avez-vous une ordonnance ? Elle est obligatoire dans le cadre du délogement sans quoi vous n’avez pas le droit de nous déloger ».

La réponse est sans appel : « Tu vas pas nous apprendre notre métier ! » ; « on agit sur réquisition du patron »… Mais lequel ?

Et pendant ce temps les camions entrent et sortent comme d’habitude.

L’avocat est informé en direct en même temps que les policiers tentent de prendre en photos les quelques soutiens et délégués syndicaux alors présents.

Parapluie dans la main gauche, téléphone dans la main droite porté à l’oreille, à peine la tête tournée côté gauche un policier, sans aucun matricule, me pousse de ses deux mains, une fois, puis deux, en vociférant « allez maintenant tu dégages ! ». Dans le même temps, 2 autres policiers s’y reprennent à plusieurs fois pour effectuer le même geste, un 4ème décoche un coup de poing au niveau de mon visage en haut à droite.

Parapluie lâché, par réflex je m’accroche au poteau de signalisation situé à proximité pour ne pas crouler sous cette déferlante de violence.

Sans aucune sommation ni signification d’interpellation je suis alors tiré par les jambes et à d’autres endroits du haut du corps par les quelques 5 voire 6 policiers autour de moi. D’autres policiers sont en position satellite de la scène pour faire évacuer les seuls témoins.

Ils me projettent violemment au sol sans raison apparente…

A plat ventre sur le béton mouillé, ils sont alors 4 puis rapidement 6 à se saisir de mes jambes tout en y portant des coups, de mes bras en les tordant contre nature, à me tirer les cheveux tout en frottant mon visage au sol en même temps qu’un d’entre eux, celui sans sans matricule, a fait pression avec son genou en bas de la nuque… je commençais alors à suffoquer… à littéralement étouffer !

Alors que par réflex j’ai essayé de mettre la main entre mon visage et le béton, je comprenais que j’étais à la merci d’un déchainement de de violence policière et que les chances de m’en sortir se réduisaient de seconde en seconde.

Finalement menotté et désormais à la merci de cette police ultra violente, je suis conduit dans la camionnette sur place en attendant le « carrosse », comme l’un d’entre eux disait, qui par la suite m’emmènera au poste de police de Lille pour 34 heures de GAV.

La couleur est affichée d’entrée puisque le même qui ne porte pas de RIO et qui m’étouffait de son genou m’a lancé : « A partir de maintenant t’es plus maître de ton destin ».

Aussi, j’ai refusé de décliner mon identité une fois dans la camionnette conformément au conseil de notre avocat et face à la salve d’insultes et de menace de mort toujours formulées par le même individu : « sale race » ; « c’est un gaucho de merde » ; « révolutionnaire de mon cul » ; « ça ça travaille pas, tu peux être sûr, c’est un fainéant qui se lève pas le matin ça » ; « ferme ta gueule j’t’ai dit » ; « toi t’as de la chance qu’on a des consignes parce que ça fait longtemps que je t’aurais défoncé la gueule » ; « hé, je te jure je te croise dans la rue en civil, j’t’attrape par le cou et j’t’arrache les yeux ! » ; « connard ! ».

Le plus étonnant a été le silence et donc l’approbation tacite des collègues de ce trublion aux propos fascisants. Comme par esprit de corps, personne ne le contredisait pas même son « chef » qui a participé de l’ « interpellation » (qui, soit dit en passant, n’a jamais été signifié).

Ca n’est que 6 heures après avoir été placé en GAV que j’ai rencontré le médecin du commissariat qui prescrira immédiatement médicament et anti-douleur et délivrant une ordonnance afin de réaliser des radios des côtes.

Visage tuméfié, une côte possiblement fissurée, hématomes au bras, à la jambe et au visage… Jusqu’à une quinzaine de policiers pour interpeler une personne dont les mains étaient occupées à autre chose que de se protéger… voilà l’usage jugé proportionné de la force par ces policiers.

Accusé d’entrave à la circulation sur une voie publique et de rébellion, la magistrate m’a relâché après 34 heures de GAV et a mis « à l’étude » le dossier…