BATAILLE DES RETRAITES, TOUS EN LUTTES !

Dans son discours de politique générale, Elisabeth Borne annonçait clairement la volonté du gouvernement : « Oui, nous devrons travailler progressivement un peu plus longtemps ». Début décembre le gouvernement indiquait que la réforme serait présentée au conseil des ministres début janvier 2023 puis examinée au Parlement à partir du printemps pour une entrée en vigueur durant l’été 2023. Le report de la présentation du texte définitif suite aux « consultations » (SIC) des organisations syndicales ne change en rien le calendrier initial.

L’urgence pour le gouvernement : faire payer toujours plus celles et ceux qui travaillent…

Malgré l’absence d’annonces officielles du gouvernement, les mesures phares du projet de réforme des retraites de Macron sont connues. Il s’agit d’abord de repousser l’âge légal de la retraite à 64 ans d’ici 2027, et jusqu’à 65 ans en 2031/2032. La durée de cotisation serait ainsi relevée de 4 mois tous les ans. Ensuite, le gouvernement souhaite accélérer la réforme Touraine (2014), un second trimestre supplémentaire tous les 3 ans serait alors nécessaire pour avoir une carrière complète et ainsi, obtenir une pension de retraite à taux plein. Enfin le gouvernement souhaite supprimer les derniers régimes spéciaux notamment ceux de la RATP et des Industries électriques et gazières (IEG). La réforme impacterait toutes les personnes nées à partir de juin 1961.

La violence de l’attaque patronale et gouvernementale est sans précédent pour l’ensemble des travailleuses et des travailleurs. Quelques soient les contreparties envisagées, cette réforme va fermer les portes d’une retraite en « bonne » (ou pas trop mauvaise) santé pour la grande majorité des travailleuses et des travailleurs.

Le gouvernement tente de justifier cette nouvelle attaque par un système déficitaire qu’il s’agirait de sauver. Or, d’une part le Conseil d’orientation des retraites (COR) déclare suite à la présentation de son dernier rapport que ses travaux « ne valident pas le bien-fondé des discours qui mettent en avant l’idée d’une dynamique non contrôlée des dépenses de retraite ». D’autre part, il est toujours nécessaire et essentiel de rappeler que le manque de recettes pour financer les régimes des retraites viennent des exonérations de cotisations patronales décidées par le gouvernement et des destructions d’emploi imposées par le patronat.

L’urgence pour le gouvernement n’est certainement pas de sauver notre système par répartition, qu’il veut au contraire le plus minimaliste possible pour favoriser le recours aux vautours des fonds de pensions par celles et ceux qui en ont les moyens. L’urgence pour le gouvernement c’est de faire payer aux travailleuses et aux travailleurs ses largesses au patronat tout en lui transférant de nouveaux marchés en cassant les droits garantis par notre Sécurité sociale.

L’imposture du gouvernement éclate au grand jour lorsque dans son projet, il encourage le cumul emploi/retraite en permettant l’augmentation des droits à cotisation, si les retraités travaillent pendant leur retraite, ce qui n’est pas possible avec le régime actuel.

Le report de l’annonce du projet gouvernemental, une bonne nouvelle ?

La présentation du projet de loi qui devait initialement avoir lieu le 15 décembre est reportée au 10 janvier. Reprenant la main sur le dossier, Macron a affirmé vouloir laisser plus de temps à la consultation.

Si certains syndicats comme la Cfdt, la Cftc ou encore la Cfe-Cgc annoncent leur opposition au report de l’âge légal, ils entendent poursuivre jusqu’au bout les « négociations » avec le gouvernement.  La question est de savoir si l’intérêt des travailleuses et des travailleurs peut se trouver dans la poursuite de ces « consultations ». La position du gouvernement est connue de toutes et de tous, et il n’entend pas revenir sur les principales mesures d’âge de sa réforme. Par conséquent, qu’aurions-nous à gagner dans ces négociations ? Rien.

Il s’agit pour le gouvernement d’un nouveau numéro de communication destiné à faire croire à l’opinion publique qu’un débat aurait eu lieu et que les avis des uns et des autres auraient été entendus. Ce report n’est pour le gouvernement qu’un coup tactique, et celles et ceux qui y voient un premier recul prennent le risque de jouer un jeu dangereux avec le gouvernement.

Nous ne pouvons ignorer que le débat parlementaire risque lui aussi d’être autoritairement bafoué par le gouvernement qui envisage comme véhicule législatif – à la réforme des retraites – un projet de loi rectificatif au PLFSS, il pourrait ainsi faire usage de l’article 49.3.

Dans ces conditions, pour les organisations syndicales en général, et la CGT en particulier, il s’agit de savoir si le processus de mobilisation des salariés doit être dicté par le calendrier législatif déterminé par le gouvernement. La Cfdt – comme les autres organisations syndicales de collaboration de classe – a répondu à cette question, affirmant qu’elle attendrait le texte définitif pour appeler à la mobilisation. La Cfdt reste cohérente avec ses « valeurs » (sic) puisqu’elle avait dénoncé les « grèves préventives » des raffineurs et de leurs syndicats CGT.

L’animation politique des luttes prônée par la CGT repose sur le refus d’être mis dos au mur par le patronat et le gouvernement pour réagir. Par conséquent, nous devons penser la mobilisation des salariés à l’aune de l’état réel du rapport de force dans la société. La multiplication des luttes dans les secteurs stratégiques – notamment ceux des transports – et à l’approche des fêtes de fin d’année, du commerce, doit être prise en compte.

L’ensemble des organisations de la CGT se doivent d’être à la hauteur des enjeux. La bataille contre cette réforme ultra régressive des retraites doit être l’occasion d’une mobilisation plus générale de l’ensemble de notre camp social pour un autre projet de société.

Défendre notre projet de société

Le système de retraite reflète un modèle de société. La CGT l’a toujours voulu solidaire, humain, sans injustice, intégrant tous les salariés vivant et travaillant dans notre pays. L’argent existe : le plein emploi, l’arrêt des exonérations et le relèvement général des salaires ainsi que du taux de cotisations patronales, l’égalité salariale entre femmes et hommes, permettront largement de financer une retraite digne du 21e siècle. On nous rétorquera que cela est impossible sans toucher aux marges des entreprises ? Effectivement, c’est aussi un objectif en même temps qu’un moyen : baisser drastiquement les profits.

La revalorisation immédiate des pensions de 10 % pour apurer les pertes de ces dernières années  devient ainsi possible, tout comme leur indexation sur les salaires et non sur les prix, avec une pension minimum égale au SMIC revendiqué par la CGT.

La lutte que la CGT doit construire est celle qui permette de garantir pour chaque salarié une retraite à taux plein à 60 ans, après 37,5 ans de cotisations, incluant les années d’études et périodes de privation d’emploi, pour un montant global garanti de 75 % du salaire de référence. Cela suppose un retour à 150 trimestres de validation et aux 10 meilleures années. Pour celles et ceux qui sont confrontés aux travaux pénibles, une retraite à 55 ans doit être garantie et une anticipation d’un trimestre par année de pénibilité pour celles et ceux qui n’auraient été exposés que partiellement durant leur carrière.

Ces mesures ambitieuses de justice sociale permettent de concevoir la mise en place d’un cadre de référence englobant régime général et retraites complémentaires, avec l’intégration à terme des retraites complémentaires dans la Sécurité sociale, pour aller vers un régime unique, les mêmes droits pour tous prenant en compte les spécificités professionnelles (pénibilité, travail posté, exposition aux produits à risque, etc.) de l’ensemble des secteurs d’activité.

Alors que le gouvernement ne parvient pas à justifier sa réforme des retraites par des arguments comptables il peine à masquer l’ampleur idéologique de son attaque. Cette croisade du gouvernement, menée au nom des intérêts du grand capital, contre les travailleuses et les travailleurs ne peut rester sans réponse. L’urgence est au rassemblement de notre camp !

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